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19 janvier 2007

«Résignation» de Lozeau

RÉSIGNATION
N'espère rien de bon de la vie : elle est vaine! 
Si le fardeau des jours t'accable à chaque pas, 
Laisse-le t'écraser et ne blasphème pas 
En voyant fuir le sang pourpre et chaud de ta veine! 

Accepte le destin sans révolte et sans haine; 
Car l'inutile effort laisse affaibli le bras, 
Et le poids qu'il soulève, avec plus de fracas, 
De plus haut choit plus lourd sur ta pauvre âme humaine! 

Que le silence soit ta plus chère vertu, 
Et ton coeur connaîtra l'orgueil de s'être tu, 
Le secret douloureux ennoblira ta peine. 

 Résigne-toi, forçat dans ta chair abattu, 
Car le temps, malgré lui, descellera la chaîne 
Qui te retient captif en la noire géhenne!
 (Albert Lozeau, L'Âme solitaire)

« M. Lozeau a lu beaucoup avant d'écrire des vers. Est-ce pour le seul besoin d'enfermer en des strophes nouvelles le thème trop connu de la Mort du Loup, qu'il a écrit à la fin de L’Âme solitaire son sonnet sur la Résignation. Cette résignation muette et têtue n'est qu'une forme de l'orgueil humain ; elle n'est pas chrétienne. D'ailleurs, on peut bien le dire, le sentiment chrétien, qui court sous l'écorce tendre de la poésie de M. Lozeau, ne s'y montre pas d'abord avec une assez vigoureuse énergie. On a bien l'impression qu'il soutient les élans de cette âme palpitante, et que c'est lui qui porte à certaines hauteurs les pensées du poète, mais dans le premier recueil surtout, ce sentiment tient encore trop du rêve ; il est traversé d'émotions trop vaporeuses, il est comme édulcoré ou affadi par des émois romantiques. Il y a dans telles strophes religieuses de L’Âme solitaire beaucoup plus de sensiblerie que de piété. » (Camille Roy, Propos sur nos écrivains, BEQ, p. 48-49)

Lozeau retirera le poème «Résignation» de l'édition définitive de ses oeuvres.

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