Jean-Guy Pilon, La fiancée du matin, Montréal, Éditions
Amicitia, 1953, 60 p.
On indique sur la page titre que cette
édition serait la deuxième, mais je crois qu’il s’agit d’une erreur : je
n’ai trouvé aucune référence à une édition antérieure. Peut-être s’agit-il d’un
deuxième tirage…
En 1953, Pilon n’a que 23 ans et est étudiant de deuxième année en droit. C’est son premier recueil et il semble
l’avoir désavoué puisqu’il ne l’a pas intégré à Comme eau retenue, la compilation de ses œuvres publiée à L’Hexagone
en 1970.
Le recueil compte trois parties.
Chacune est placée sous la tutelle d’un poète connu et précédée de quelques
vers en exergue de ce dernier.
La fiancée du matin, la
première partie qui a donné son nom au recueil, est dédiée à Rina Lasnier. Dans
une entrevue, Pilon a révélé que cette dernière l’avait accompagné dans son
travail poétique pendant deux ans. La
fiancée du matin est un long poème sentimental, d’une quinzaine de pages, divisé en huit sections, comme autant d’étapes
d’un premier amour qui se termine mal : ainsi se succèdent l’amour rêvé, la rencontre, l’amour
fou, la rupture, la peine d’amour, le deuil amoureux, les tentatives de
comprendre, la guérison. Le jeune Pilon utilise un style fleuri qui n’a rien
d’une « eau retenue ». On a droit à beaucoup d’effusions, de lyrisme,
d’épanchements romantiques, d’exclamations…
Dans Poèmes du midi, sous
l’égide de Paul Éluard, le style est beaucoup plus contenu. L’amour est encore le
sujet des 15 poèmes de cette partie, sans les débordements de La fiancée du matin. Dans plusieurs
poèmes, le poète s’efforce de dire la grandeur de son amour : « De tes yeux penchés sur ma vie / À ton épaule infaillible de courage, /
De tes lèvres créées pour l’amour / À l’instant du jour attendu, / Tu es toute
ma joie. » Il essaie aussi de projeter son couple dans le futur :
« Quand le don total / Illuminera nos souffles, /…/ Nos mains s’uniront /
Par un clair matin d’été. / Voile de dentelle, / Robe blanche, / Anneau
discret ». L’amour lui permet d’envisager son futur en toute
quiétude : « Mais tu es là pour toujours et rien n’arrivera / Car tu
rajeunis le monde à chaque instant du don ».
Pilon choisit le parrainage
d’Alain Grandbois dans Poèmes du soir. Ce n’est peut-être
pas un thème qui unit les 16 poèmes qui composent cette partie, mais plutôt un
état d’esprit, un mélange d’inquiétude et de nostalgie. On pourrait même y voir un bilan, si le terme peut s’appliquer à un jeune homme au début de la
vingtaine. Plusieurs poèmes sont tournés vers l’enfance, « Souvenir du
temps des jeux / Des heures perdues / Où tout était lumineux. » Le poète essaie
de retrouver l’enfant qu’il était : « J’ai perdu une part de moi-même
/ Dont je me souviens à chaque pas ». Il sait qu’il faut en finir
avec le passé : « Les portes sont closes / Sur les souvenirs en allés
/ Les jeux sont finis / Dans l’herbe verte et tendre ». Pilon termine son recueil
en évoquant un passé plus récent et c’est ici que perce l’inquiétude devant le
monde qui s’offre à lui : « N’espérant que l’instant du don / Et la
chance du désir / Le fruit mûr regarde l’espace / De ses yeux étonnés de silence. »
La fiancée du matin lançait la carrière littéraire de Pilon. De toute évidence, l’auteur cherche son style, mais quelques vers ici et là nous annoncent l’important
poète qu’il deviendra.
Jean-Guy Pilon sur Laurentiana
La fiancée du matin
Les cloîtres de l'été
Les matinaux
Les débuts de l'Hexagone
L'homme et le jour (à venir)
Aucun commentaire:
Publier un commentaire