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10 août 2018

La mort à vivre


Georges Cartier, La mort à vivre, Malines, CELF, 1955, 44 pages.

La première image que nous sert Georges Cartier, c’est celle de personnes qui pénètrent dans une forêt pour y trouver apaisement et liberté. Les poèmes des pages suivantes présentent un peu la même trajectoire : on dirait que le poète tente de recoudre ce qui est brisé, de relier ce qui est séparé, d’équilibrer ce qui est débalancé. Donnons quelques exemples :

« L’arbre isolé incline / Sous le poids d’amour et de joie / De l’oiseau qui chante seul / Au plus secret du feuillage » (Assentiment)

« La barque est rendue / Souvenir égaré / Au soleil de la baie / Pour qu’à travers les âges / La mer berce toujours / Des barques renouvelées. » (Voix marines)

« Ophélie! / Tes cheveux sont à jamais noués / Aux branches lasses du saule / Qui ploient sur toute mobilité / Mais qui toujours te garderont / Présence! » (Ophélie)

Le ton change à partir de la page 21. Il y a toujours une recherche d’équilibre, mais cette fois-ci entre la vie et la mort : « Il y a la mort à vivre / Et tout courage mendie / De connaître la mort / Pour incarner la vie » (La mort à vivre). Comme s’il fallait entrer la mort dans notre vie pour donner un sens à celle-ci. L’idée est certes étrange, pour ne pas dire lugubre. On a droit à une petite visite au cimetière : « Pour avoir mis quatre limites / Bien justes bien étroites / Pour avoir mis au centre juste / Des stèles étroites bien polies / … / Les vivants les pauvres / Les misérables vivants / Croient avoir relégué les morts / Au lieu choisi de leur absence ». (La mort a ceinturé les hommes) Ou encore, beaucoup plus cru : « Tu parles beaucoup trop / Laisse à toi seul la mort / Te dire ses confidences / Tu apprendras le sens / Et tu verras le centre / De chacun de tes désirs : // Un carré de quelques pieds / Un trou de terre humide » (Quand nous aurons tout dit)

Dans le dernier poème, l’auteur nous dit que l’amour, sans lever la nécessité de lier la vie à la mort, offre la possibilité d’être heureux. L’amour magnifie toutes choses dont la nature, l’amour relie les humains entre eux : « Et notre amour vivant / Et notre mort vécue / Sont l’énigme éclairée / De notre joie de vivre » (Mort–Amour). L’amour harmonise la vie et la mort.

Les poèmes sont tous un peu construits de façon semblable : les vers sont courts, très équilibrés,  et il en va de même des strophes. Ce recueil a été publié en Belgique et a remporté le prix Interfrance en 1954.

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