Jean de la Glèbe, Le Diable est aux vaches, Québec , Imprimerie
de l'Action sociale, 1911, 77 p.
(Lu en ligne)
L`histoire est très simple. Jean-Baptiste
Pinette, un fermier ambitieux, a augmenté trop rapidement son cheptel. L’hiver, il doit aller travailler dans les
chantiers, pour gagner de l’argent, laissant le soin des animaux à sa femme et
à ses jeunes enfants. Ses animaux, maintenus dans des
conditions insalubres, sont malades et certains sont déjà morts. Bref « le
diable est aux vaches ». De retour des chantiers, il décide
de faire appel au Sauvage, un espèce de guérisseur (un soigneux), en fait un
ivrogne qui a des connaissances en médecine vétérinaire mais qui aime bien
laisser croire qu’il a des pouvoirs surnaturels. Arrivé chez Pinette, le Sauvage déclare qu'un sort pèse sur la ferme de Pinette. Il ordonne une corvée pour nettoyer l'étable et construit un système de ventilation (fenêtres et
ventilateur sur le toit) en prétendant que le « Mauvais » va ainsi sortir à
l’extérieur.
Ce n’est pas vraiment de la
littérature, mais plutôt une « pochade », comme le dit l’auteur. Le
texte est construit de telle sorte que l'auteur puisse y ajouter des « messages publicitaires ». Par exemple, l’auteur
raconte que les animaux de Jean-Baptiste Pinette seraient mieux gardés s’il
employait la clôture « Julien » ou encore qu’on peut se procurer un
ventilateur chez I. L. Lafleur, 366 rue Notre-Dame à Montréal. À la fin du
volume, on a même droit aux plans d’un poulailler modèle, en plus de toutes
sortes de publicités peine page qui concernent l’agriculture.
L’auteur se plaît à reproduire le
langage des vieux paysans, qui francisent les mots anglais (les tonnechipes, Sir
Djâne Maquedelaine, les chantiers de la Boundry [boundary], plier ses sleighs,
les factories…) mais aussi le vieux français québécois (ains seulement, un
siau, un électeur convalescent, drette, les tinettes, la terre est impotiquée,
le bi [corvée]…).
Le narrateur s’adresse au lecteur et lui offre même de le rembourser si son récit le déçoit. Il y a beaucoup d’humour dans le
texte de Monsieur de la Glèbe, à commencer par son nom. Il semble que ce
soit un religieux qui se cache derrière ce surnom, le frère Liguori Blais (1870-1925), fondateur en 1909 de l'Union expérimentale des agriculteurs de Québec, coopérative vouée à la diffusion de la science agricole.
Jean de la Glèbe donne une description plutôt satirique des
agriculteurs, mais je ne pense pas qu’il veuille les déconsidérer : ils
sont naïfs, assez étroits d’esprit, manquent de jugement, rétrogrades. De plus, la vie à la
ferme semble particulièrement difficile : les fermiers misent autant sur la forêt que sur leur terre et, pour rester dans l'imagerie du titre, ils tirent le diable par la queue. Est-ce suffisant pour parler d’anti-terroir? Je ne le pense pas. L'auteur s'est assuré qu'il n'y ait aucune ambiguïté en nous servant, au tout début du récit, un « À RETENIR » sur les vertus de l'agriculture. Et si ce n'est pas suffisant, le lecteur n'a qu'à lire la
longue dédicace pour comprendre que l'auteur ne se prend pas au sérieux, l’essentiel n’étant pas là. Et quel est cet « essentiel »?
Jean de la Glèbe milite en faveur de pratiques agricoles
plus modernes, celles mises en oeuvre par L'Union expérimentale d'Oka.
Le livre est disponible sur le site de la BANQ.
Ces curiosités constituent de vos billets ceux que je préfère!
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