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7 février 2010

Une intrigante sous le règne de Frontenac

Jean-Baptiste Caouette, Une intrigante sous le règne de Frontenac, s. n., Québec, 1921, 145 p.

Ce roman repose sur deux faits historiques. Comme on le sait, en 1690, Frontenac repousse une attaque de William Phips et sauve la Nouvelle-France. À cette occasion, il prononce son célèbre « Dites à votre général que c’est par la bouche de mes canons et à coups de fusils que je lui répondrai… » Malheureusement, ce fait historique est expédié en un court chapitre. L’autre événement, moins connu, a trait aux relations entre Frontenac et sa femme. Cette dernière avait refusé d’accompagner son mari vieillissant en Nouvelle-France. Certains ont prétendu que la relation entre le comte et la comtesse s’était gâtée. La rumeur était accentuée par le fait que Madame de Frontenac, surnommée « la divine », était l’une des dames les plus admirée à la cour de Louis XIV. Sur cette anecdote, Caouette va tisser l’essentielle de sa longue « nouvelle ». En voici le résumé :

Madame DeBoismorel, une jeune intrigante, est veuve depuis un an. Elle est la plus belle femme qui fréquente les fêtes que Frontenac offre à l’occasion au château Saint-Louis. Elle s’est mise en tête de remplacer la comtesse auprès du gouverneur. Pour ce, elle veut provoquer leur divorce. Elle envoie au comte des lettres anonymes qui dénoncent la conduite scandaleuse de la comtesse. Son frère, son complice, resté en France, envoie à la comtesse des lettres aussi calomnieuses sur le comte. Frontenac et la comtesse ne sont pas dupes et ont tôt fait de découvrir la manigance et ses auteurs. Madame DeBoismorel est ramenée en France et condamnée à l’exil avec son frère. Les deux se réfugient en Allemagne où, pendant six ans, ils mènent une vie exemplaire. Devant leur sincère repentir, grâce à l’intervention de la comtesse de Frontenac, ils peuvent rentrer en France. Madame DeBoismorel consacre le reste de sa vie aux bonnes œuvres et son frère rejoint l’armée de son pays.

La nouvelle est suivie d’une série de documents dans lesquels on trouve différents renseignements sur le comte de Frontenac : ses armoiries, sa généalogie, son testament, un portrait de la « Divine » et la légende du coffret d’argent (À sa mort Frontenac aurait demandé que son cœur soit retiré de son corps et expédié en France. Certains ont répandu la rumeur que la comtesse aurait refusé le colis).

J’aurais préféré un roman qui ait plus de chair et, surtout, qui nous fasse connaître Frontenac. Il y avait sans doute matière pour un bon roman historique à la Joseph Marmette. L’auteur a plutôt choisi de tout miser sur un fait divers.

Extrait
Nous croyons juste et nécessaire d’ouvrir ici une courte parenthèse.
Pour détruire les sottes légendes que certains historiens ont brodées avec un art diabolique sur le compte du gouverneur Frontenac et de son épouse, il me suffira, je crois, de résumer l'opinion— appuyée sur la raison et l'autorité de l'histoire—, d'un de nos écrivains les plus consciencieux, feu Ernest Myrand:
"Madame de Frontenac fut un pouvoir caché dans le rayonnement du trône de Louis XIV.
"Arbitre reconnu de l'élégance, du bon goût et du bel esprit, madame de Frontenac possédait le don de se créer autant d'amis que de connaissances qui, tous, avaient pour elle une admiration pleine de respect.
"Cette fascination irrésistible, la comtesse—diplomate l'employa à notre profit en deux circonstances mémorables : la première, lors de la nomination de son mari (6 avril 1672) au poste de gouverneur de la Nouvelle-France, et la seconde quand elle fit rentrer Frontenac (7 juin 1689) dans son gouvernement de Québec.
"Ne lui gardons pas une amère rancune d'être demeurée là-bas, en France, tout le temps que durèrent les deux administrations de son mari. Demeurant à Paris en permanence, madame de Frontenac était bien placée pour conjurer les intrigues, répondre aux plaintes et combattre les ennemis du gouverneur cherchant à le perdre, à le ruiner dans l'estime de Louis XIV par tous les moyens secrets ou déclarés." (Frontenac et ses amis, Ernest Myrand, Québec, 1902.)

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