Charles Edmond Rouleau,
Légendes canadiennes, Québec, Imprimerie du Soleil, 1901, 326 pages. (Illustrations
et appendice : J. A. Ferland)
En introduction,
Rouleau cherche, lui aussi, à obtenir l’indulgence de ses lecteurs. Il n’a pas
la « prétention de [se] placer au rang de ces hommes privilégiés qui sont
appelés à illustrer le pays par leurs écrits ». Il se réclame de Nodier, admettant qu’il n’a
fait que « recueillir » des histoires qui « se transmettent de
génération en génération ». On comprend que ses « légendes
canadiennes » ont d’abord été publiées dans le journal Le Soleil.
La cabane des fées – Saint-Anne-de-la-Pocatière,
1759. Les Micmacs s’abritent dans une caverne pour se cacher des Anglais. Lorsque
la famine survient, une fée vole à leurs secours.
Le cap Martin – Saint-Anne-de-la-Pocatière
en 1832, l’année du grand choléra. Le père Martin raconte à quatre étudiants
comment son père, fuyant la ville, a survécu à un naufrage grâce à un
scapulaire.
Le docteur l’Indienne – Au
cours d’une visite à Saint-Jean-Port-Joli, un étudiant raconte à ses pairs l’histoire
du docteur l’Indienne, un criminel qui a tué un colporteur qui lui avait
demandé l’hospitalité.
Le Cap-au-Diable – Sur les battures de Kamouraska, un chasseur
aperçoit des diablotins qui dansent autour d’un feu. Il en touche un d’un coup
de fusil, ce qui annule la métamorphose dont il était victime. Il découvre que
c’était un co-paroissien qui était ensorcelé.
Bravoure de deux Canadiens – Deux
gaillards osent s’aventurer dans une maison hantée abandonnée depuis des
décennies, mais paient cher leur audace.
Un bon riche – Un jeune homme, après la
mort de ses parents, tombent dans la dèche. Et un jour il hérite d’une fortune
d’un oncle américain. Comme tout cet argent ne le rend pas heureux, il le donne
aux pauvres et se fait moine.
Dernière invasion fénienne – Dans une
paroisse située sur le bord du fleuve Saint-Laurent, dans le comté de Témiscouata.
Une guerre est annoncée. Loin des grands centres, la rumeur veut que Montréal
et Québec soient déjà tombées aux mains des Féniens. Une famille prend la fuite craignant l’arrivée
de l’ennemi.
L'art de chasser les feux follets – Un
homme raconte la terrible bataille livrée à un feu follet dans la cave d’un habitant
de Charlesbourg. En fait, il n’y avait pas de feu follet, mais une petite lumière…
Le millionnaire – Un notaire se laisse berner par un faux
document qui prétend qu’un « simple » a hérité d’une immense fortune
en provenance d’Allemagne.
Une maison hantée – Une maison hantée
qui n’en est pas une. Ce sont des enfants qui jouent aux fantômes.
La femme plus rusée que le diable – Une
femme, dont le mari a vendu son âme au diable, utilise un subterfuge pour tromper
le diable et sauver son mari.
Une couturière – Chaque semaine, Julie,
une couturière, donne 1 franc au curé pour les âmes du purgatoire. Quand le
travail vient à manquer, c’est une de ces âmes du purgatoire qui vole à son
secours.
La chambre du revenant – Un homme a loué
la chambre de son fils défunt avec lequel il était à couteaux tirés. Le fantôme
du fils se manifeste pour chasser tout intrus qui pénètre dans son ancienne
chambre.
Puissance de l' « Ave Maria »
– Gaston est débauché. À la mort de sa mère, il hérite d’une fortune qu’il
dilapide. Avant de se suicider, il récite un Ave Maria pour tenir une promesse faite à sa mère. L’illumination
survient, il se convertit et entre au monastère.
Le Souvenez-vous – Les zouaves
pontificaux arrêtent un brigand qui finit par se convertir avant d’être
fusillé.
La fin du monde – Un fermier trouve, écrit sur un
œuf, un message qui annonce la fin du monde. Et tout le monde d’aller à la confesse en
prévision du grand événement. Or, on découvre que c’est un voisin qui lui avait
joué un tour.
Le moulin du diable — Les gens des
Écureuils et de Cap-Santé croient que le moulin sur la Jacques-Cartier est
hanté. Un pêcheur découvre que ce sont des bandits, faisant partie du célèbre gang de Cap-Rouge, qui s’abritent à l’occasion dans ce moulin.
Les deux prisonniers – Un dénommé Godin
raconte au jeune narrateur les exploits de son grand-père, un homme à la force herculéenne,
lors de guerre de la Conquête.
L'évasion – Suite de la nouvelle
précédente.
Le
recueil de Rouleau contient 20 légendes qu’on se racontait autrefois lors des
veillées. Beaucoup d’entre elles ont une double narration : Rouleau
présente des gens, bien réels, qui ont vécu ces faits étranges ou qui en ont
été les dépositaires. C’est à eux qu’on raconte l’histoire. Il arrive même qu’il leur laisse la parole. Bien entendu,
le procédé vise à authentifier le récit, à faire en sorte que les lecteurs se
sentent concernés, donc à donner plus de poids dramatique au récit. Dans
l’appendice, son ami Ferland présente même deux lettres de gens qui ont connu
le fameux docteur l’Indienne. Dans ce cas-ci, on peut croire que ce criminel a vraiment existé.
« Je vais vous raconter une histoire vraie,
mirobolante, merveilleuse, étonnante et désopilante. » Bien entendu, il s’agit
de raconter une histoire qui excite l’imagination des auditeurs-lecteurs, qui les
sortent du réel. Croyances fantastiques, parfois à teneur religieuse, et faits
étonnants alternent.
Il faut le dire, le passage de l’oral à l’écrit, n’est pas toujours
convaincant. On le sait, l’intérêt de ces légendes tenait beaucoup au conteur
lui-même, à sa capacité de ménager des effets.
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