15 février 2019

Légendes canadiennes (Rouleau)

Charles Edmond Rouleau, Légendes canadiennes, Québec, Imprimerie du Soleil,  1901, 326 pages. (Illustrations et appendice : J. A. Ferland)

En introduction, Rouleau cherche, lui aussi, à obtenir l’indulgence de ses lecteurs. Il n’a pas la « prétention de [se] placer au rang de ces hommes privilégiés qui sont appelés à illustrer le pays par leurs écrits ».  Il se réclame de Nodier, admettant qu’il n’a fait que « recueillir » des histoires qui « se transmettent de génération en génération ». On comprend que ses « légendes canadiennes » ont d’abord été publiées dans le journal Le Soleil.

La cabane des fées – Saint-Anne-de-la-Pocatière, 1759. Les Micmacs s’abritent dans une caverne pour se cacher des Anglais. Lorsque la famine survient, une fée vole à leurs secours.

Le cap Martin – Saint-Anne-de-la-Pocatière en 1832, l’année du grand choléra. Le père Martin raconte à quatre étudiants comment son père, fuyant la ville, a survécu à un naufrage grâce à un scapulaire.

Le docteur l’Indienne  –  Au cours d’une visite à Saint-Jean-Port-Joli, un étudiant raconte à ses pairs l’histoire du docteur l’Indienne, un criminel qui a tué un colporteur qui lui avait demandé l’hospitalité.

Le Cap-au-Diable –  Sur les battures de Kamouraska, un chasseur aperçoit des diablotins qui dansent autour d’un feu. Il en touche un d’un coup de fusil, ce qui annule la métamorphose dont il était victime. Il découvre que c’était un co-paroissien qui était ensorcelé.

Bravoure de deux Canadiens  –  Deux gaillards osent s’aventurer dans une maison hantée abandonnée depuis des décennies, mais paient cher leur audace.

Un bon riche – Un jeune homme, après la mort de ses parents, tombent dans la dèche. Et un jour il hérite d’une fortune d’un oncle américain. Comme tout cet argent ne le rend pas heureux, il le donne aux pauvres et se fait moine.

Dernière invasion fénienne – Dans une paroisse située sur le bord du fleuve Saint-Laurent, dans le comté de Témiscouata. Une guerre est annoncée. Loin des grands centres, la rumeur veut que Montréal et Québec soient déjà tombées aux mains des Féniens.  Une famille prend la fuite craignant l’arrivée de l’ennemi.

L'art de chasser les feux follets – Un homme raconte la terrible bataille livrée à un feu follet dans la cave d’un habitant de Charlesbourg. En fait, il n’y avait pas de feu follet, mais une petite lumière…

Le millionnaire –  Un notaire se laisse berner par un faux document qui prétend qu’un « simple » a hérité d’une immense fortune en provenance d’Allemagne.

Une maison hantée – Une maison hantée qui n’en est pas une. Ce sont des enfants qui jouent aux fantômes.

La femme plus rusée que le diable – Une femme, dont le mari a vendu son âme au diable, utilise un subterfuge pour tromper le diable et sauver son mari.

Une couturière – Chaque semaine, Julie, une couturière, donne 1 franc au curé pour les âmes du purgatoire. Quand le travail vient à manquer, c’est une de ces âmes du purgatoire qui vole à son secours.

La chambre du revenant – Un homme a loué la chambre de son fils défunt avec lequel il était à couteaux tirés. Le fantôme du fils se manifeste pour chasser tout intrus qui pénètre dans son ancienne chambre.

Puissance de l' « Ave Maria » – Gaston est débauché. À la mort de sa mère, il hérite d’une fortune qu’il dilapide. Avant de se suicider, il récite un Ave Maria pour tenir une promesse faite à sa mère. L’illumination survient, il se convertit et entre au monastère.

Le Souvenez-vous – Les zouaves pontificaux arrêtent un brigand qui finit par se convertir avant d’être fusillé.

Une veillée chez ma grand'mère – Une Grand-mère raconte trois histoires fantastiques ayant comme motif un cheval noir, une bête diabolique et l’invocation des esprits.

La fin du monde – Un fermier trouve, écrit sur un œuf, un message qui annonce la fin du monde.  Et tout le monde d’aller à la confesse en prévision du grand événement. Or, on découvre que c’est un voisin qui lui avait joué un tour.

Le moulin du diable — Les gens des Écureuils et de Cap-Santé croient que le moulin sur la Jacques-Cartier est hanté. Un pêcheur découvre que ce sont des bandits, faisant partie du célèbre gang de Cap-Rouge, qui s’abritent à l’occasion dans ce moulin.   

Les deux prisonniers – Un dénommé Godin raconte au jeune narrateur les exploits de son grand-père, un homme à la force herculéenne, lors de guerre de la Conquête.

L'évasion – Suite de la nouvelle précédente.


Le recueil de Rouleau contient 20 légendes qu’on se racontait autrefois lors des veillées. Beaucoup d’entre elles ont une double narration : Rouleau présente des gens, bien réels, qui ont vécu ces faits étranges ou qui en ont été les dépositaires. C’est à eux qu’on raconte l’histoire. Il arrive même qu’il leur laisse la parole. Bien entendu, le procédé vise à authentifier le récit, à faire en sorte que les lecteurs se sentent concernés, donc à donner plus de poids dramatique au récit. Dans l’appendice, son ami Ferland présente même deux lettres de gens qui ont connu le fameux docteur l’Indienne. Dans ce cas-ci, on peut croire que ce criminel a vraiment existé.

« Je vais vous raconter une histoire vraie, mirobolante, merveilleuse, étonnante et désopilante. » Bien entendu, il s’agit de raconter une histoire qui excite l’imagination des auditeurs-lecteurs, qui les sortent du réel. Croyances fantastiques,  parfois à teneur religieuse, et faits étonnants alternent.

Il faut le dire, le passage de l’oral à l’écrit, n’est pas toujours convaincant. On le sait, l’intérêt de ces légendes tenait beaucoup au conteur lui-même, à sa capacité de ménager des effets.

 Charles-Edmond Rouleau — « Né à Sainte-Anne de la Pocatière le 18 septembre 1841, du mariage de Charles Rouleau et de Sophie Lebrun, En 1865, il s’enrôla dans l’armée canadienne pour combattre les Féniens. Trois ans plus tard, en 1868, il partait pour Rome dans le régiment des zouaves canadiens. Il resta dans l’armée papale jusqu’en 1870. À son retour au pays, il fit du journalisme à la Minerve, au Bien Public, au Canadien, à l’Événement, au Courrier du Canada, puis au Soleil. M. Rouleau décéda à Québec, le 24 décembre 1926. »


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