Théophile et Joséphine Plouffe vivent dans le quartier Saint-Sauveur à Québec avec leurs « grands enfants » : Cécile, Ovide, Napoléon et Guillaume.
Première partie (été 1938)
Denis Boucher s’est lié d’amitié avec le révérend Brown, un pasteur protestant dont l’amie étudie à l’Université Laval. Comme celui-ci est aussi recruteur pour les Reds de Cincinnati, Denis veut lui présenter Guillaume Plouffe, l’athlète de Saint-Sauveur. Tout tombe pour le mieux puisque Guillaume doit participer, le soir même, au championnat d’anneaux de la ville de Québec. Le pasteur est tellement impressionné par sa performance qu’il demande qu’on organise un match de baseball pour qu’il puisse le voir lancer. Le curé Folbèche est furieux : il reproche à Denis Boucher d’avoir introduit le loup protestant dans sa bergerie catholique. Pour l’amadouer, mais aussi parce qu’il a besoin de son appui pour devenir journaliste, Boucher le convainc de lancer la première balle du match contre le pasteur qui agit comme frappeur. Le curé le retire au bâton et Guillaume accomplit une performance. Ovide, le frère de Guillaume, un intellectuel très peu porté sur le sport, assiste au match avec Rita Toulouse. Celle-ci ne s’intéresse guère à lui. Ovide compte sur ses qualités de chanteur pour la conquérir. Quelques jours plus tard, avec des amis, il monte à son intention un opéra dans la maison des Plouffe. Le tout tourne au désastre quand la belle disparaît avant la fin du spectacle avec Guillaume et, encore plus, quand le lendemain elle le ridiculise devant tous les employés de l’usine où les deux travaillent. Dépité, Ovide décide de rentrer au monastère.
Deuxième partie (printemps 1939)
Un événement va bouleverser la vie des Plouffe : la visite du roi et de la reine. Tout le monde décore sa maison de drapeaux, sauf Théophile Plouffe qui refuse par patriotisme. Le défilé vient près de tourner mal quand Guillaume, pour attirer l’attention des souverains, lance une balle qui les effleure. Denis Boucher, promu journaliste à L’Action chrétienne, écrit un article vitriolique pour dénoncer la visite royale et félicite Théophile Plouffe, le seul qui ne s’est pas abaissé à garnir sa maison de drapeaux anglais. Comme par hasard, Théophile est remercié de ses services par le journal L’Action chrétienne qui l’employait comme typographe. Boucher organise une rébellion, mais le mouvement se dégonfle rapidement, d’autant plus que Théophile est victime d’une crise qui le laisse paralysé.
Troisième partie (septembre 1939)
La guerre est déclarée. Ovide, obsédée par le souvenir de Rita, quitte le noviciat et renoue avec la jeune fille qui est beaucoup plus sensible à ses avances. Il l’invite au Château Frontenac. Napoléon a aussi une amoureuse : elle est malade, confinée dans un sanatorium, et s’appelle Jeanne Duplessis. Quant à Cécile, elle continue de recevoir Onésime, son ancien amoureux, marié et père de famille, jusqu’au jour où il meurt, victime d’un accident. Guillaume, lui, a reçu une avance des Reds de Cincinnati et il vit dans l’attente de son départ.
Quatrième partie (mai-juin 1940)
Ovide est maintenant ambulancier. Il n’attend plus qu’une amélioration de sa situation financière pour épouser Rita. La conscription est déclarée. Les religieux organisent une immense procession de la Fête-Dieu pour l’éviter. Pourtant, le cardinal Villeneuve surprend tout le monde en encourageant les Canadiens français à s’enrôler. Un télégramme arrive des États-Unis : le contrat de Guillaume est annulé à cause de la guerre. Le père, Théophile, meurt.
Épilogue (mai 1945)
Ovide et Rita sont mariés et ont un enfant, mais leur relation va mal. Napoléon et Jeanne sont aussi mariés et ont quelques enfants. Cécile vit toujours avec sa mère : elle a adopté un enfant d’Onésime. Quant à Guillaume, il est en Europe et il attend d’être rapatrié, après avoir participé à la guerre.
Le roman se présente comme une suite de tableaux. Les descriptions n’envahissent pas le récit, l’auteur préférant mettre en scène ses personnages. On comprend qu’il ait été tentant d’en faire un téléroman, puis un film, tous les deux réussis d’ailleurs. Cela peut aussi expliquer son succès populaire : Lemelin a l’art de développer des scènes savoureuses, tantôt montrant deux personnages (Guillaume et Rita dans l’escalier ou encore Ovide et Rita au Château), tantôt tout un groupe (la partie d’anneaux, la procession [voir l’extrait]). Il réussit même à faire vivre tout un quartier, comme il l’avait déjà fait dans Au pied de la Pente douce. On peut aussi expliquer le succès de ce roman par le choix et le développement des personnages qui sont juste assez caricaturaux, tous sympathiques tout compte fait. Pensons à la bonne mère Plouffe qui écrase pourtant sa famille de son autorité, au père qui fanfaronne à la taverne mais qui s’écrase devant sa femme, à Cécile la vieille fille frustrée mais généreuse, à Ovide l’intellectuel raffiné mais incompris, à Guillaume le super sportif peu intelligent, à Rita la belle frivole... Pensons aussi au curé Folbèche, un prêtre d’une autre époque, ancré dans un patriotisme chatouilleux, plus préoccupé à maintenir son pouvoir sur ses ouailles qu’à répandre le message évangélique.
On voit très bien dans ce roman le lien entre l’église et la politique (le curé Folbèche est un patriote aveugle), le fossé entre le bas clergé et le haut clergé acoquiné avec le pouvoir, la complicité entre les curés et les mères de famille, piliers de la morale chrétienne. Bien que nous soyons en ville, la mentalité paroissiale est très forte, ce qui n’est pas si difficile à imaginer aujourd’hui : il suffit de faire le décompte des églises qui continuent de pointer leurs clochers dans le ciel de Québec. On voit bien aussi les difficultés économiques et l’absence de débouchés pour les intellectuels, tels Denis Boucher et Ovide Plouffe. *****
Quatrième partie (mai-juin 1940)
Ovide est maintenant ambulancier. Il n’attend plus qu’une amélioration de sa situation financière pour épouser Rita. La conscription est déclarée. Les religieux organisent une immense procession de la Fête-Dieu pour l’éviter. Pourtant, le cardinal Villeneuve surprend tout le monde en encourageant les Canadiens français à s’enrôler. Un télégramme arrive des États-Unis : le contrat de Guillaume est annulé à cause de la guerre. Le père, Théophile, meurt.
Épilogue (mai 1945)
Ovide et Rita sont mariés et ont un enfant, mais leur relation va mal. Napoléon et Jeanne sont aussi mariés et ont quelques enfants. Cécile vit toujours avec sa mère : elle a adopté un enfant d’Onésime. Quant à Guillaume, il est en Europe et il attend d’être rapatrié, après avoir participé à la guerre.
Le roman se présente comme une suite de tableaux. Les descriptions n’envahissent pas le récit, l’auteur préférant mettre en scène ses personnages. On comprend qu’il ait été tentant d’en faire un téléroman, puis un film, tous les deux réussis d’ailleurs. Cela peut aussi expliquer son succès populaire : Lemelin a l’art de développer des scènes savoureuses, tantôt montrant deux personnages (Guillaume et Rita dans l’escalier ou encore Ovide et Rita au Château), tantôt tout un groupe (la partie d’anneaux, la procession [voir l’extrait]). Il réussit même à faire vivre tout un quartier, comme il l’avait déjà fait dans Au pied de la Pente douce. On peut aussi expliquer le succès de ce roman par le choix et le développement des personnages qui sont juste assez caricaturaux, tous sympathiques tout compte fait. Pensons à la bonne mère Plouffe qui écrase pourtant sa famille de son autorité, au père qui fanfaronne à la taverne mais qui s’écrase devant sa femme, à Cécile la vieille fille frustrée mais généreuse, à Ovide l’intellectuel raffiné mais incompris, à Guillaume le super sportif peu intelligent, à Rita la belle frivole... Pensons aussi au curé Folbèche, un prêtre d’une autre époque, ancré dans un patriotisme chatouilleux, plus préoccupé à maintenir son pouvoir sur ses ouailles qu’à répandre le message évangélique.
On voit très bien dans ce roman le lien entre l’église et la politique (le curé Folbèche est un patriote aveugle), le fossé entre le bas clergé et le haut clergé acoquiné avec le pouvoir, la complicité entre les curés et les mères de famille, piliers de la morale chrétienne. Bien que nous soyons en ville, la mentalité paroissiale est très forte, ce qui n’est pas si difficile à imaginer aujourd’hui : il suffit de faire le décompte des églises qui continuent de pointer leurs clochers dans le ciel de Québec. On voit bien aussi les difficultés économiques et l’absence de débouchés pour les intellectuels, tels Denis Boucher et Ovide Plouffe. *****
Extrait
Une intense atmosphère dominicale s'abattait sur cette soirée de vendredi où cent mille personnes sortirent d'une table de semaine pour entrer dans un après-souper solennel. Il faisait une chaleur humide, amortissante, et la ville, sous un lourd baldaquin de nuages, semblait condamnée à un orage certain auquel personne pourtant ne croyait à ; cause de la puissance du Sacré-Cœur.
A mesure que l'heure de la cérémonie approchait, la ville subissait une curieuse transformation. La circulation cessa, ou presque, et les quelques voitures ou tramways qui avançaient encore avaient l'air de véhicules sacrilèges égarés sur des pavés mutiles.
Car une nouvelle hiérarchie des rues s'installait. La Foi déjouait les règles de la topographie: de grands boulevards se transformaient en cul-de-sac et des ruelles devenaient des voies royales. Les rues élues par le défilé serpentaient triomphalement de l'église St-Roch à l'Hôtel de Ville, flamboyantes de drapeaux et de banderoles, laissant dans l'ombre la multitude des chemins qui drainaient jusqu'à elles la population vibrante.
À sept heures les cloches sonnèrent la mobilisation des croyants et des patriotes, et l'exode vers le point de départ du défilé, l'église St-Roch, commença. Les hommes, les femmes, les jeunes filles, les enfants surgissaient de partout, grossissant les cohortes attirées par le tracé lumineux. On s'étonnait même qu'il y eût tant de monde dans cette, cité paisible, comme on est surpris de constater la multitude des papillons qui peuplent les nuits d'été quand une lumière s'allume soudain. Seuls des malades, des infirmes et des vieillards semblaient encore habiter quelques maisons, où des radios transmettaient les premières rumeurs de la cérémonie. (p. 432-433)
Roger Lemelin sur Laurentiana
Les Plouffe
Au pied de la pente douce
Fantaisies sur les péchés capitaux
À lire : Les Plouffe chez les anglophones
Visionner l'extraordinaire jeu de Gabriel Arcand
Très intéressant. Retour complet sur le roman, parfait pour se bien se remémorer ce roman avant un examen !
RépondreEffacerSauf erreur, c'est notre première série télévisée au début des années '50, celle que PERSONNE ne manquerait le mercredi soir....présenté par Player's!!
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