26 novembre 2006

Le Pèlerin de Saint-Anne

Pamphile Le May, Le Pèlerin de Saint-Anne, Montréal, Granger frères, 1930, 363 p. (Illustrations de André Fournier) (Première édition : Darveau, 1877,  312 et 341 pages)

Les Letellier avaient deux enfants et une belle terre. Le père meurt dans un naufrage et sa femme, quelque temps après, en mettant au monde la petite Marie-Louise. Un vieux garçon, beau-frère de Jean Letellier, Eusèbe Asselin, accepte de prendre avec lui son neveu et sa nièce. Ce geste n’est pas motivé par l’altruisme. Il espère s'approprier de la terre des Letellier. Bientôt, il épouse une femme à son image, aussi dure que lui envers les enfants. En fait, les deux rêvent de se débarrasser des enfants et de détourner leur héritage au profit de leurs propres enfants.

Quelques années passent. Joseph, le petit garçon, à force de maltraitances, finit par fuguer et se retrouve à Québec. Sa petite sœur Marie-Louise reste avec les deux tortionnaires. Joseph est accueilli par une femme qui tient un tripot fréquenté par des marins, des cageux et quelques malfrats dans le vieux Québec.

Ayant vieilli, Joseph monte dans les chantiers et devient un homme, qui jure comme un bûcheron. Un jour, une drôle d’aventure survient : par bravade, il défie Dieu de lui couper la langue et, voilà qui est fait, il est devenu muet. Il change du tout au tout, se convertit.

Au printemps, il revient sur une cage qui s’échoue à Lotbinière. Or, le même jour, sa vilaine belle-mère avait décidé de perdre sa petite sœur, de l’égarer dans les bois. C’est Joseph, par la plus grande des invraisemblances, qui la découvre sur le bord du Saint-Laurent, qui l’amène sur la cage, jusqu’à Québec, sans la reconnaître toutefois.

Ici, il faut revenir un peu en arrière. Le méchant Asselin avait un beau-frère, Racette, une crapule qui faisait l’école et qui prenait plaisir à martyriser Joseph. Or, ce même Racette se retrouve lui aussi à Québec, ayant fui Lotbinière, après avoir débauché une fille qui l’a suivi, Geneviève Bergeron. Il reconnaît la petite Marie-Louise et tente de l’enlever pour la ramener à son beau-frère, mais elle réussit à fuir avec Geneviève qui s'est ouvert les yeux sur son copain Racette. Ce dernier s’est acoquiné avec des malfrats qui ont l’intention d’aller voler Asselin à son insu. Joseph, au courant de leurs intentions, lui aussi, repart à Lotbinière, devance les bandits, se fait engager chez Asselin qui ne le reconnaît pas. Il veut neutraliser les bandits mais ne réussit pas. Pire, le crime passe pour être le sien, le muet étant incapable de se défendre. Il est mis en prison.

Fin de la première partie.

Un citoyen de Cap-Santé témoigne en sa faveur et il sort de prison. Il entreprend un pèlerinage à Sainte-Anne-de-Beaupré afin de recouvrer la parole. Racette, toujours décidé à se venger de Geneviève et désireux de ramener la petite Marie-Louise aux Asselin pour que ceux-ci ne perdent pas l'héritage convoité, par hasard retrouve Geneviève et Marie-Louise. De concert avec les malfrats de la basse-ville, ils enlèvent Marie-Louise, mais cette dernière réussit encore à fuir. Joseph décide de rentrer à Lotbinière, d'exiger son héritage. Il retrouve ses anciens parents et Noémie, l’amoureuse qu’il s’est faite lors du voyage précédent.Les voleurs, par crainte d’être dénoncés, décident de l’éliminer. Le maître d’école et le chef des brigands sont désignés pour exécuter la basse besogne qui échoue. Le chef des brigands y laisse sa vie. Le roman se termine par le mariage de Joseph et Noémie, son amie d’enfance. Les Asselin doivent quitter Lotbinière.


Cette édition est dédiée à la « jeunesse » et a été expurgée, ce que nous révèle un rapide coup d’œil à l'édition originale. Par exemple, dans le second tome, le chapitre VIII, intitulé « Luxure et chasteté », est devenu « L'attentat » et certains passages relatifs aux « petites amies » du héros ont été supprimés. 

Comme ce résumé en témoigne sans doute, l’intrigue est rocambolesque, avec toutes sortes de ramifications secondaires, dont il est difficile de rendre compte. Les péripéties se bousculent, les rebondissements se succèdent, action et pathétique s’entremêlent, bref on est devant un récit populaire. Inutile de chicaner sa vraisemblance, la faiblesse des personnages… L'écriture de Lemay est peu travaillée. Camille Roy écrit dans son Histoire de la littérature canadienne-française : « En prose, Le May a publié de médiocres romans : Le Pèlerin de Sainte-Anne (1877); Picounoc le Maudit (1878); L'Affaire Sougraine (1884). Il traduisit aussi de l'anglais Le Chien d'or de William Kirby (1884). » ***
 
Édition originale
Extrait (le début du roman)
Notre belle paroisse de Lotbinière, d'ordinaire si calme, est depuis quelques jours, dans une surexcitation singulière. Si l'on rencontre un ami sur le bord de la route, à peine a-t-on dit : Bonjour ! que l'on ajoute, avec un mouvement de tête bien significatif : Crois-tu ! Quel exemple ! Et l'ami répond : C'est terrible ! ou : C'est admirable ! selon que sa pensée se porte vers l'un ou l'autre des événements qui viennent d'arriver. Les hommes restent quelquefois plongés dans une rêverie profonde ; les femmes parlent beaucoup. Lorsque deux d'entre elles s'arrêtent devant une porte, une troisième survient, puis une quatrième, puis une autre, puis toutes les femmes du canton. Parfois alors arrive Geneviève Bergeron. Elle vient le plus souvent de l'érablière, et, des larmes plein ses grands yeux hagards, elle demande d'une voix dolente : N'avez-vous pas vu la petite Marie Louise? Pauvre petite ! il faut que je la trouve ; sa mère me l'a confiée Elle n'est point dans la fosse du ruisseau ; la fosse est remplie ... L'eau coule sur le cadavre du méchant mais elle ne lavera point ses crimes Et, sans attendre de réponse, elle part chantant sur l'air mélancolique du " Fil de la vierge ".

1 commentaire:

  1. Merci M. Lessard, pour les détails du livre, je collectionne les livres anciens et un blogue comme le vôtre est une source d’informations pratiques et rapides. Ce livre m’a été donné hier, en fait je l’ai sauvé des ordures! C’est fou tout ce que les gens jettent!! Mais me voici aussi à faire un tri en étudiant chaque acquisition à l’aide du Web.

    Bravo pour votre bon travail,
    Véronique, galerie Point rouge

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