Sylvain Garneau, Les trouble-fête, Montréal, Éd. De Malte, 1952, 77 pages. (Dessins de Pierre Garneau)
J’ai
déjà écrit sur le destin tragique de Sylvain Garneau quand j’ai blogué son
premier livre, Objets
trouvés. J’ai aussi souligné que les trois éditions de sa poésie, au style
d’une autre époque, témoignent de l’intérêt que l’œuvre suscite dans
l’institution littéraire. Je n’y reviendrai pas.
Ce
recueil compte trois parties.
Amours
Comme
le titre l’indique, l’amour est le principal thème. L’amour envisagé, observé
de l’extérieur, à travers les yeux d’un enfant, rêvé, désiré, vécu, perdu,
l’amour qui inquiète, qu’on cherche à cerner : « Si je l’aimais, je
le saurais… ». Finalement, l’amour auquel on ne croit pas vraiment :
« C’est doux de savoir que jamais, / Jamais ils ne diront : je t’aime ».
Souvent le thème est mis en scène plutôt que traité directement : on se
trouve dans un tramway, un café, un cabaret, la maison familiale.
Trompettes
« L’ai-je
aimée? On le croit. Ou n’est-il que deux heures / À trois heures, je sais, on
n’aime déjà plus. » Ce sont les premiers vers de la deuxième partie. Encore
l’amour? Pas vraiment. Cette partie est plutôt constituée d’une série de
saynètes qui mettent en scène des personnes aux prises avec leur quotidien,
souvent banal, tout compte fait des personnes déçues, un peu tristes, qui
rêvent d’évasion. « Le soir, tu rêves aux ruisseaux / Où s’abreuvent les
lionceaux. / Tu vois les lys, les herbes folles, / Les grands soleils et
corolles. […] Mais, vient le matin, on se lève / Bonjour la vie ! Adieu, les
rêves ! »
Palissades
Le
premier poème s’intitule « Les trois prisons ». Je cite : « La première
prison était dans une ville »; « La seconde prison, en haut de la
falaise, / Avait l’air d’un château, sous ses ormes penchés »; « La
troisième prison n’a ni mur ni barreaux ». Rien n'y fait, et même l'amour, le poète se sent piégé et il n'a plus qu'une idée, fuir, s'évader vers d'autres lieux qu'ils soient réels ou fantaisistes « Ô murs de mes
prisons, ne m’en gardez rancune. / Laissez-les s’effacer, les cœurs et les
chansons. / Je m’en vais pour toujours au pays des poissons / Chercher parmi les
joncs des pépites de lune ». Ou encore : « Je vais dans un pays sans neige et sans enfants / Plus loin que la montagne, au bout des cimetières ».
Peut-être
que la lecture d’un recueil est toujours biaisée, mais encore plus
quand on sait que l’auteur va se suicider quelques mois plus tard. On cherche
des indices et, forcément, on en repère. Sans qu’il s’y trouve de drames, de
plaintes, de désespoirs, une grande tristesse enrobe la plupart des poèmes de Sylvain Garneau.
Du même auteur:
Objets trouvés.
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