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10 décembre 2012

L’Épreuve


Paul-Émile Prévost, L’Épreuve, Montréal, Alpoh. Pelletier, 1900, 142  pages.

Orphelin, Paul Goulier a pu faire des études grâce à la rente que son père lui a laissée. Il est devenu fonctionnaire au ministère des travaux publics. Il compte se marier bientôt avec Violette, une amie d’enfance. Son petit monde s’effondre quand on l’accuse d’avoir payé un malfrat pour tuer son supérieur, soi-disant par ambition. Bien que plusieurs doutent de sa culpabilité, il est condamné à mort. Sa peine est commuée en prison à vie et il se retrouve prisonnier à Saint-Vincent-de-Paul. Telle est l’épreuve qu’évoque le titre.

Violette refuse de croire à sa culpabilité malgré les objurgations de sa mère, de son frère, du curé et du meilleur ami de Paul, Rodolphe. Ce dernier, d’ailleurs, lui fait une cour assidue. Il veut l’épouser, ce qu’elle refuse. Il essaie par tous les moyens de la contraindre, allant jusqu’à salir son ancien ami. Violette, obstinée dans son amour, tombe malade et finit par mourir. Rodolphe, plein de remords, finit par avouer que c’est lui qui a comploté contre son ancien ami pour le faire accuser. Son mobile : il était amoureux de Violette.

L’Épreuve est coiffé d’une préface de neuf pages!  Prévost nous livre une véritable dissertation sur la femme. C’est tellement gros qu’il vaut mieux en rire : 

« L'homme serait hardi, qui déclarerait solennellement bien connaître la femme. Ce qu'il en pourrait dire, serait approuvé par les unes, mais fortement démenti par les autres ; une seule chose pouvant les mettre toutes d'accord : l'adresse de n'en dire que du bien.
Mettant de côté cette énorme particularité, de n'en pas dire du mal, il reste encore le vaste champ d'en dire beaucoup de bien - dans ce sens que le tempérament délicat est ce qu'il y a de plus aimable et que chez elle la psychologie de sa vie jaillit de son cœur.
Les hommes qui la connaissent moins imparfaitement que les autres, savent très bien ce qu'il ne faut pas dire et ce qu'il faut faire pour lui plaire. Encore ils échouent souvent, malgré la meilleure intention, parce la, femme a une sensibilité que l'homme n'a, pas, à laquelle il ne peut atteindre, ni par entraînement, ni par adresse, ni par sa nature : Eux, comme les plus ignorants et les moins sensitifs, s'assoient involontairement sur son cœur.
L'homme, quoique bon, ne vaut donc pas la femme, toute méchante qu'elle est bien souvent. Retranchant ce qu'il y a de mauvais chez les deux, avouant en passant que la quantité est énorme chez la femme, ce qui reste chez cette dernière vaut encore mille fois plus que tout ce que l’homme a conservé. » 

Et encore, plus loin : 

« La femme a une telle organisation, un tempérament si sensible, une âme si grande, que beaucoup, d'auteurs ne lui font faire et dire que du bien, tout le long d'un roman, sans rendre celui-ci moins intéressant pour cela. C'est que la femme de bien est sublime et commande le respect en attirant la curiosité. La monotonie est moins grande, si l'on y glisse un peu de son œuvre mauvaise -puisque c'est bien elle qui, entre temps, a inventé la trahison, l'appétit du lucre, le mensonge, et encore... — mais n'est-il pas suffisant de le savoir, sans qu'on l'écrive pour l'irriter davantage, mériter sa haine et nous la faire moins aimer. Oublions tout cela et adorons-la, puisque les dieux l'ont faite... c'est encore, ce qu'ils ont fait de mieux, a dit Banville. »

Le roman est un mélodrame sans grand intérêt. On devine assez vite l’intrigue, les personnages et leurs sentiments tombent dans les pires stéréotypes. En plus, le style est ampoulé comme ce n’est pas possible. Prévost se prend pour rien de moins que Racine. L’action se passe en partie à Charlesbourg, encore une campagne à l’époque.  Sa description peut intéresser le lecteur contemporain. Il en va de même pour la description d’une fête de la Saint-Jean au XIXe siècle (p. 90 et sv.).

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