LIVRES À VENDRE

12 mars 2009

Âmes et Paysages

Léo-Paul Desrosiers, Ames et Paysages, Montréal, Le devoir, 1922, 183 pages.


J’ai déjà blogué plusieurs livres de Desrosiers. Voici son premier, un recueil de neuf nouvelles, qui valsent entre l’amourette et l’intrigue politique.

Fécité
Fécité (sic) fut servante pendant trois générations dans la famille du narrateur. Tout le monde l’aimait, car elle était la « bonté incarnée ».

Un charivari
À Berthier, un jeune médecin vient remplacer son confrère décédé. Pour faire « belle figure », il démontre un peu trop ses bonnes manières au goût des gens. Lorsqu’il se marie avec la veuve de son prédécesseur, pour se moquer de lui, on lui mène un charivari d’enfer (voir ce site).

La petite oie blanche
Une jeune fille, fraîchement émoulue du couvent, se languit au fond d’un rang. Elle rêve d’amour et n’a pour prétendant qu’un gentil voisin qui lui fait une cour tout en malices.

Prosper et Graziella
Un petit fonctionnaire obséquieux tombe amoureux d’une grande fille extravertie.

Au bord du lac bleu
Annette, une jeune fille libre et passionnée, s’est éprise de Pierre, un garçon possessif, contrôlant, jaloux. Comme elle ne cesse de le faire souffrir, il décide de la quitter.

MargueritePar un ami, Paul apprend que Marguerite aimerait le rencontrer, ce qu’il accepte. Il lui fait la cour et elle semble en être contente. Pourtant, au fil des mois, cette fille ne trahit jamais le moindre sentiment amoureux. Il finit par l’abandonner, même s’il sait qu’il aura mal.

Le rêveurUn contemplatif, qui peut décrire un coucher de soleil dans ses moindres variations, rencontre une jeune fille qui le sort de son monde onirique. Pourtant, rapidement elle se désintéresse de lui.

Une intrigue de palais
Jean Dorion, le ministre chouchou des hommes d’affaires, a décidé de forcer la main du premier ministre pour qu’il lui cède sa place. Il rallie les bailleurs de fonds du parti, quelques journalistes et quelques députés mécontents. Le premier ministre doit lui céder sa place.

Un cénacle
Le jeune Gaston, qui se croit poète, a été invité par un ami à assister à une réunion d’intellectuels « branchés ». Il est décontenancé par les théories esthétiques (la querelle du régionalisme) de certains. Quelques jours plus tard, la vue de La Victoire de Samothrace lui permet de retrouver son équilibre littéraire. Il est évident que le jeune Gaston apprécie peu les Exotiques, qu’il penche du côté des régionalistes, même si sa position me semble plus évoluée que celle des terroiristes purs et durs.

C’est le premier livre de Desrosiers. Les résumés ne rendent pas compte de la qualité d’écriture de ces nouvelles : la description et l’analyse des personnages, l’évocation somptueuse de la nature nous valent de belles pages. La dernière nouvelle saura intéresser les amoureux de la petite histoire littéraire.

Extrait
Gaston se tait. Ses sources, au dedans de lui-même sont libérées. Il les sent jaillir comme le sang qui gicle d'une veine coupée. Les vieilles règles s'affirment en lui. Il a le sentiment d'entrer dans un monde plus grand, plus clair, plus pur où l'équilibre de l'esprit occupe le trône, où la lumière baigne tous les paysages, et chasse les ombres, où l'on cherche la justesse de l'intelligence comme le plus précieux trésor et la discipline de la sensibilité; dans un monde où l'on ne bâtit pas les chefs-d’œuvre à la manière barbare, en entassant les métaux précieux, à l'aventure, mais où l'idée et la conception ont une valeur primordiale qui emporte le reste avec elles. Il apprend que l'être humain, seul, est faible et débile, et que c'est en communiant aux forces plus vastes que la sienne, la nature et le peuple, en laissant les échos de leurs voix se répercuter en échos infinis au fond de son âme, en les épurant, les clarifiant, les exprimant pour dégager leur ampleur qu'il atteindra aux chefs-d’œuvre immortels. Et pour que les exaltations populaires ne fassent point éclater et ne brisent point son âme, pour qu'elles ne fassent point trembler son stylet et changer sa voix en sanglots, ou en mots inarticulés, il a besoin lui aussi d'héroïsme, de courage et d'une volonté toute puissante.

Et Gaston s'en retourne, l'âme purifiée, après avoir reconquis le plus grand don des artistes et des écrivains : la sérénité et la paix intérieure. Il a rejeté de lui-même ainsi que d'inutiles scories, l'apitoiement sur sa destinée, les théories qui le retenaient prisonnier, toutes les doctrines qui alourdissaient son élan et empêchaient son essor. Après avoir vomi les aliments indigestes, sa jeune nature reprend son mâle équilibre et il se met au travail avec un esprit calme. (p. 182-183)

Œuvres de Desrosiers sur Laurentiana
Âmes et paysages
Nord-Sud
Le Livre des mystères
Les Engagés du Grand Portage
Les Opiniâtres
L’Ampoule d’or

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