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14 mars 2007

Récits laurentiens

Marie-Victorin, Récits laurentiens, Montréal, Québec, Frères des écoles chrétiennes, 1942, 217 p. (1ère édition : 1919) Dessins d'Edmond Massicotte et préface d'Albert Ferland.

L’édition originale, celle de 1919, compte 209 pages. La préface est comptabilisée dans cette première édition tandis qu’elle est numérotée en chiffres romains dans celle que je présente. Celle-ci n’est pas un fac-similé, mais s’en approche. La préface de Ferland, la dédicace et les illustrations de Massicotte sont identiques. Seules les lettrines sont légèrement modifiées. 

« La corvée des Hamel » : Un vieil orme, déjà « gros quand l’homme blanc parut aux rives du Saint-Laurent », poussait devant la maison ancestrale de Siméon Hamel. Tout le monde connaissait l’orme des Hamel, cet arbre que les Autochtones disaient « habité par un puissant manitou ». Il « avait trente-six pieds de tour à hauteur d’homme ». Comme il est vieux et pourri, l’arbre perd ses branches lors des tempêtes. Un jour un voisin, dont le fils fut quasiment blessé par une branche, exige qu’il soit abattu. Le vieux Hamel est atterré mais doit s’y résoudre. La mort dans l’âme, il organise une corvée, conviant tous les Hamel. Le vieux meurt un mois plus tard.

« Le rosier de la vierge » : Un rosier a poussé dans une niche du portail de l’église de l’Ancienne-Lorette qui abrite une madone. Or, ce rosier aérien finit par endommager le portail, et un homme est chargé de le supprimer. Mal lui en prend car son échelle casse en deux et il se blesse gravement. Cédant à la superstition, on ne touche pas au rosier pendant vingt ans. Un nouveau bedeau, qui n’a pas froid aux yeux, décide de faire son sort au rosier, malgré les avertissements des paroissiens. Il va s’exécuter quand, du haut de l’échelle, il aperçoit sa maison en flammes. Plus personne n’ose attaquer le rosier de la vierge. Quand on détruit l’église, au début du vingtième siècle, les paroissiens se partagent les boutures si bien que tous les rosiers d’Ancienne-Lorette descendent de cet ancien.

« La croix de Saint-Norbert » : Souvenir d’une croix que le narrateur voyait, l’été, lorsqu’il passait ses vacances à Saint-Norbert. Cette croix, plantée par le premier aïeul, lui rappelle sa prime jeunesse et lui permet de retrouver le souvenir de sa mère.

« Sur le renchaussage » : Le jeune Conrad passe ses étés à Saint-Norbert, chez ses grands-parents,  avec ses oncles, tous gens taquins, heureux d’asticoter le jeune urbain. Cet été-là, en boutade, ils décident de lui demander de cultiver le renchaussage de la maison. Conrad les prend aux mots, et avec l’aide de tout le monde, monte une petite ferme miniature sur le renchaussage. Il sème et tout pousse. L’été tirant à sa fin, et sa récolte étant presque mûre, un petit drame survient. Un voisin en visite oublie d’attacher son cheval et ce dernier dévaste complètement la petite récolte.

« Charles Roux » : Les gens de Saint-Norbert disent qu’il est fou. En fait, il est différent. Il passe ses journées à lire et, le soir venu, il chante des hymnes religieux. Il habite le grenier d’une maison et quand il sort, les enfants, indirectement encouragés par les adultes, s’en moquent. Un jour Conrad et ses amis profitent de son absence pour se glisser dans son antre. Mais Roux revient et Conrad n’a pas le temps de fuir. Au lieu de le quereller, Roux lui parle plutôt gentiment, espérant être compris par cet enfant venant de la ville. Un lien se tisse entre eux. Quelques années passent. Conrad est devenu grand et instruit. Quand il revient à Saint-Norbert, personne n’attend plus fébrilement son retour que Roux. Roux accumule les questions, plutôt d’ordre scientifique, et les pose à Conrad quand il le voit.

« Ne vends pas la terre » : Le vieux Félix Delage possède une terre sur le chemin Chambly. Il a consacré toute sa vie à l’agriculture. Mieux, il lui voue un culte. Mais voilà que l’étalement urbain menace sa foi agriculturiste. Un promoteur veut acheter sa terre. Félix résiste et incite son fils à faire comme lui. « Ne vends pas la terre! » lui dit-il. Trois ans passent. Son fils meurt. Il est seul avec ses deux petits-fils. Il doit vendre. Au moment de partir, alors que la pancarte est déjà installée, voyant sa peine, les petit-fils lui demandent à leur tour : « Ne vends pas la terre! » Le vieux s’empresse d’enlever la pancarte.

« Jacques Maillé » : Saint Jérôme, 1872. Le curé Labelle, désireux de promouvoir son chemin de fer, a organisé une corvée pour le lendemain. Il a demandé à ses colons d’apporter un voyage de bois à Montréal (10 heures de route) pour les pauvres. Deux cents attelages répondent à son appel. Le vieux Maillé, qui s'est querellé avec son fils Arthur, décide d’y participer. Chaque colon se voit attribuer une adresse. Le vieux Maillé atterrit chez son fils, marié et père d’un enfant, qui vit dans une grande pauvreté. Ils se réconcilient.

« Le colon Lévesque » « Il faut que la forêt recule pour que la race avance. » Jean-Baptiste Lévesque a été dépouillé du bien paternel par son frère revenu juste à temps des États-Unis. Jean-Baptiste doit donc partir avec sa femme et ses sept enfants pour le Témiscamingue. Il s’installe sur une terre de colonisation à Mont-Carmel. Deux ans plus tard, leur ancien curé vient les visiter. Trois enfants se sont ajoutés. Ils peinent dur – et c’est peu dire – mais conservent dignité et espoir en des jours meilleurs. Le curé est venu avec une mission. Son frère américain, celui-là qui l’a dépouillé, est mort et a laissé un orphelin : il demande à Jean-Baptiste de s’en occuper, ce que le colon Lévesque accepte.

« Peuple sans histoire » : Durham est en train d’écrire son rapport. Il a pour servante la fille d’un patriote mort au combat, ce qu’il ignore. Pendant qu’il est endormi, elle se permet de lire un peu le rapport et découvre la fameuse phrase « C'est un peuple sans histoire ». Elle ne peut s’empêcher d’ajouter : vous mentez et elle signe Madeleine de Verchères. Quand Durham découvre l’impolitesse, il est d’abord fâché. Puis, il pose des questions à la jeune fille qui lui raconte avec passion l’histoire de Madeleine de Verchères. Il ne peut qu’admirer cette jeune fille. On présente Durham comme un homme sensible et cultivé. Ce sont des motifs politiques (l’assimilation est la seule voie possible pour maintenir la paix) plutôt que des préjugés qui lui auraient dicté son rapport.


Je préfère les Récits laurentiens à ses modèles : Chez nous d’Adjutor Rivard et Les Rapaillages de Lionel Groulx. Il y a pour ainsi dire beaucoup plus de chair autour de l’os, en d’autres mots la trame événementielle est plus riche et les personnages mieux développés. Pour ce qui est de l’idéologie, c’est très conservateur : encore une fois, famille, passé, religion, patriotisme, campagne idéalisée, bref la recette classique du terroir. Il me semble quand même qu’on y trouve plus de diversité et moins de nostalgie du temps passé. «L'Orme des Hamel» est un classique des anthologies.

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Certains récits ont été publiés dans une édition destinée à la jeunesse.


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