Gilles Constantineau, La pêche très verte, Montréal, Chez l’auteur, 1954, 27 pages. (Préface de Roger Rolland et 5 lavis de Normand Hudon)
Le recueil, le fait d’un jeune homme de 21 ans, est très court : il ne contient que 15 poèmes. Pourtant, il se démarque de la plupart des recueils des années 1950. On n’épiloguera pas longuement sur le contenu, les poèmes parlent d’amour. Tout au plus affleurent quelques questionnements existentiels. Bref, rien de dramatique comme on le voit souvent chez les jeunes auteurs qui abordent ce thème. Chez Constantineau, tout est dans la manière. Il a du Jacques Prévert dans le nez. Le langage est très simple, souvent très près de l’oral, ce qui n’était pas si fréquent à l’époque. Il se permet de « poétiser » des sujets qui s’y prêtent peu, comme un dialogue entre un cheval et une vache. Humour et dérision sont ses alliés de prédilection. L’auteur veut bien nous faire comprendre qu’il ne se prend pas trop au sérieux. Par exemple, il termine par un pied-de-nez son poème sur l’échec amoureux : « Marie s’est donnée / à dix-huit maris / tous abandonnés / j’en pleure ou j’en ris / je ne suis pas né / ça fait peu de bruit / Ferdinand de Lesseps / le canal de Suez / l’amour les forceps / Seigneur j’accouchai d’écœurantes fadaises! »
Bref, ce petit recueil est rafraîchissant dans l’atmosphère un peu lourde des années 1950. Les illustrations de Normand Hudon, très modernes et humoristiques, contribuent à cette légèreté. Voici un des poèmes (sans titre, sans majuscule, sans ponctuation) dont Marie a été la muse.
j’irai pour voir
les yeux ta crinière un soleil
tes seins une plage et du sable
où rouler sur ton ventre blanc
ton rire un océan léger
ta jambe immobile et molle
pourtant ton sang joyeux et fol
le feu sous la cendre
et j’irai pour voir
ta main divine faisant
ma part de l’eau de la terre
ton bien de l’enfer et du ciel
Gilles Constantineau (1933-1985) a été journaliste au Canada, au Nouveau Journal, à Radio-Canada, au Soleil. Il a aussi collaboré au Devoir et au Magazine Maclean. Il a publié trois recueils de poésie : La pêche très verte (1954) à compte d’auteur; Simples poèmes et Ballades (1960) et Nouveaux poèmes (1972) à l'Hexagone.
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