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14 octobre 2022

Privilèges de l’ombre

André Brochu, Privilèges de l’ombre, Montréal, L’hexagone, 1961, 37 p. 

L’anaphore est le procédé dont se sert André Brochu pour développer la plupart des poèmes. Ces reprises engendrent  des poèmes rythmés, musicaux, chantants. Tout le recueil est très lyrique.

 

« Les mots servent bien nos mensonges

Tout ce qu’on écrit c’est jouer

Et même pas l’illusion d’être ». (premier poème )

 

Le jeu est présent tant au niveau verbal que dans le contenu. Les mots ne semblent pas avoir de poids d’où les notions d’illusion et de mensonge. « J’ai fait grand carnage des mots / Et de mots il me reste à peine / Pour dire non ». Certaines situations dramatiques sont traitées avec une certaine désinvolture, sinon un humour noir : « Ne plus aimer / Ne plus pleurer / Ne plus trahir // Être cadavre // Être cercueil ». La dérision est peut-être le sentiment le plus présent dans le recueil. Même les histoires d’amour n’y échappent pas : « Toujours reconstruire nos songes / Pour en vivre les ruines / C’est le secret de notre amour / Mort ô fidèle ». On pourrait dire que le poète refuse le jeu qu’il est en train de jouer : « Je me défie des mots / Qui miment la parole / Je me défie des cris / Qui simulent l’angoisse / Je me défie des larmes / Qui parodient l’amour ». Le recueil se termine dans le grand vide beckettien : « Vide il n’y a plus que le vide // Il n’y a plus / Que tes mots disant le silence / Et le silence dit l’absence ».

 

Brochu n’avait que 19 ans quand il publie Privilèges de l’ombre, ce qui peut expliquer le romantisme du désenchantement plutôt convenu dont il se nourrit.  

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