12 avril 2019

Larmes d'amour

Laure Conan, Larmes d’amour, Leprohon & Leprohon, Montréal, 1897, 60 p.

Francis Douglas, un bel Écossais, est en villégiature à La Malbaie. Toutes les femmes sont en pâmoison devant lui, d’autant plus qu’il est réservé et semble parfois triste. Thérèse, l’héroïne de cette histoire, connaissait déjà ce jeune homme puisqu’il avait sauvé sa mère adoptive lors d’un voyage à Philadelphie. Elle est très sensible à son charme. Lors d’une discussion, il lui avoue qu’il a perdu un ami très cher, d’où sa tristesse. Il lui dit aussi qu’il est protestant. Rapidement, les deux en viennent à s’aimer.

Plutôt que de retourner dans son pays, Francis décide de demeurer auprès de son amoureuse, à Montréal. Les deux projettent de se marier malgré la différence de religion. Thérèse vit tout cela difficilement et espère le convertir : « J’ai porté son bouquet à l’église, je veux qu’il se fane devant le saint sacrement, et quand il sera flétri, j’irai le reprendre pour le conserver toujours. Seigneur Jésus, vous êtes au milieu de nous et il ne vous connaît pas. Il ne croit pas au mystère de votre amour. Mais vous pouvez lui ouvrir les yeux de l’âme, et le faire tomber croyant et ravi à vos pieds. » Mais Francis est bien décidé à conserver sa religion : « Il est vrai, nous ne professons pas tout à fait la même foi, mais tous les deux, nous savons que Dieu nous aime et qu’il faut l’aimer ; tous les deux, nous savons que secourir les pauvres est un bonheur et un devoir sacré ; tous les deux, nous croyons que Jésus-Christ nous a rachetés par son sang. Ma noble Thérèse, ma fiancée si chère, ne craignez donc pas d’être ma femme ; ne craignez pas de vous appuyer sur mon cœur pour jusqu’à ce que la mort nous sépare par l’ordre de Dieu. »

De guerre lasse, elle décide d’offrir à Dieu sa vie pour la conversion de Francis. « Et alors elle me dit qu’en voyant comme Francis demeurait préjugé, aveuglé, malgré les prières continuelles qu’elle faisait faire pour sa conversion, elle avait cru que Dieu voulait peut-être la faire contribuer à son salut plus que par la prière, et qu’elle avait offert son bonheur et sa vie pour lui obtenir la foi. » La veille de son mariage, Dieu exerce son vœu : dans l’espace de quelques heures, Thérèse frappée d’un mal soudain et inguérissable décède. C’est en assistant à ses derniers moments que la grâce frappe Francis. « Tout est fini pour moi sur la terre, et pourtant je succombe sous le poids de la reconnaissance, car la lumière s’est faite dans mes ténèbres et je suis catholique, oui, catholique, Ah ! béni soit Dieu qui m’a donné la foi ! » Un an après avoir pleuré sa belle, il se fait baptiser, retourne en Europe et entre au monastère de la Grande Chartreuse.

L’histoire est très romantique, avec ses deux héros orphelins qui découvrent leur amour sur les berges du Saint-Laurent à La Malbaie.  Ce qui semblait au départ audacieux – le mariage d’une catholique et d’un protestant – devient on ne peut plus convenu : le sentiment religieux ne laisse aucune place à l’humain, comme si l’amour de Dieu ne pouvait souffrir aucune concurrence. En choisissant cette fin, Laure Conan « s’épargne » le débat sur le mariage interconfessionnel. Dommage.


Laure Conan sur Laurentiana

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