Janette Bertrand, Mon cœur et mes chansons, Montréal,
Pascal, 1946, 92 pages.
L’épigraphe va ainsi : « L’amour, c’est beaucoup plus que
l’amour. Comment démêler un sentiment si simple ? Il y entre toujours autre
chose, l’âme après les sens, l’âge, la douleur… » Jacques Chardonne
Dans Mon cœur et mes chansons, Janette Bertrand choisit de parler
d’Amour avec un grand A. Même si de temps à autre, très rarement en fait, l’amour
est conçu au sens plus large, le plus souvent il s’agit de sentimentalité, des
rêves et des dépits d’une adolescente. On est un peu surpris par cette jeune
fille, si avide d’amour qu’elle est prête à accepter n’importe quoi. « Qu’il
me déteste! / Mais qu’un sentiment fasse trembler sa lèvre. / Qu’il me batte! /
Mais qu’il s’occupe de moi! » Avec Janette, sait-on jamais, ce
« je » qui s’exprime avec autant d’impudeur, est-ce vraiment le sien?
L’incompréhension des hommes, la peine amoureuse, l’amant cruel auquel elle
donne la parole, le sentiment d’abandon, inspirent la poète :
Pourquoi te retiendrais-je
Quand ton désir est ailleurs ?
Pars. Sans me regarder pleurer
Et frémir comme une feuille esseulée.
Pars.
La vie sera belle
Sans moi, tu sais.
Pars, avant que je te crie la vérité,
Avant que finisse mon hypocrisie,
Et que tu lises dans mes yeux
Cette plainte,
Cette supplication :
Mon amour, ne pars pas !
La poète (ou la jeune fille) finit quand même par prendre
une certaine distance :
La vie est-elle si morne, si décevante,
Qu'il faille attendre,
Toujours attendre ?
Tenir le bonheur au bout d'un fil,
Et passer sa vie à tirer sur le fil ?
Le ciel est gris et ennuyeux.
J'attends.
J'attends quoi ? Tout.
La plénitude, la largesse.
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