2 août 2019

Feuilles tombées

ATALA (Léonise Valois), Feuilles tombées, Montréal, Librairie Beauchemin, 1934, 84 p.
(Préface de Lionel Groulx)

Léonise Valois est l’auteure du premier recueil de poésie publié par une femme : Fleurs sauvages (Montréal, Beauchemin, 1910). Il lui a donc fallu 24 ans pour écrire son second.

Dans la préface, Lionel Groulx, né à Vaudreuil tout comme Valois, souligne le caractère historique de son précédent ouvrage et vante les qualités d’écrivaine de sa compatriote : « Moi-même j’ai fait des vers qui ne valent pas ceux d’Atala. »

Feuilles tombées contient 33 poèmes de facture classique, écrits entre 1912 et 1934, présentés en ordre chronologique, sans autre principe de structuration. Plusieurs reprennent des thèmes chers aux romantiques : les amours malheureuses, la nature amie, la fuite du temps, les lieux liés à des souvenirs (Le Lac Tremblant, – « O beau Lac, souris à mon rêve / et recueille ici mon soupir ! » – le lac Saint-Francois), les personnages historiques admirés (Marguerite Bourgeoys, Sainte-Thérèse d’Avila), les sentiments religieux et patriotiques (cinq poèmes sur la première guerre mondiale : « Patrie ! », « Véronique », « Au retour », « À l’immortel », « À la langue française »).

On lit aussi quelques poèmes de circonstance : poème de Noël (le retour du  fils prodigue), de première communion ; plusieurs sont dédicacés : à ses jeunes amies, à ses parents, à un lieutenant, à un lieutenant-colonel, à sa nièce, « à elle de lui », à Blanche Lamontagne.

Le recueil contient, enfin, quelques poèmes plus personnels : une certaine impuissance, qui tient peut-être à la condition féminine de l’époque, y est très présente. La poète attend que sa vie change, sans trop y croire, et s’en remet au sentiment religieux. Le poème intitulé « La souffrance » traduit bien cet état de résignation (lire l’extrait).

Sur Laurentiana : Fleurs sauvages
Sur Léonise Valois

LA SOUFFRANCE
À  ma jeune amie A. M.

Tu la voyais venir et tu croyais la vaincre,
Mais la vampire a pris tout le sang de ton cœur.
Et tu restes sans vie et n’osant que te plaindre,
Sans trop penser qu’ainsi tu trompes ta douleur.

Que de sourds cris d’angoisse étouffés dans ton âme!
Que de sanglots obscurs qui n’ont pas vu le jour !
Et tu restes debout sans courage et sans flamme,
Sur la cendre fumante où se tord ton amour.

Tu voudrais bien mourir de la même agonie,
T’éteindre avec ton rêve, et d’un pareil essor,
Remonter avec lui dans la plaine infinie
Où les beaux oiseaux bleus n’ont que des songes d’or.

La terre te retient et, geôlière infâme,
Cloue ta vie au malheur ; dans tout ton cœur, quel mal !
Quel ange donnera des ailes à ton âme
Pour te porter à Dieu, le divin Idéal !

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