Claude Fournier, Les armes à faim, Saint-Hyacinthe, Chez
l’auteur, 1955, 44 pages. (Page
couverture : L.-H. Desjardins)
Dans le poème liminaire, intitulé « Art poétique », Fournier émet l’idée que la poésie peut servir d’exutoire : elle peut contrer le malheur en nous ouvrant à l’amour.
Dans Les arrérages de
dieu, le poète narrateur se pose en « acheteur
de ce monde », mais il a tôt fait de constater que le compte n’y est pas. Comment
expliquer que « les hommes […] meurent / D’un cancer du système » et qu’ils en sont reduits à « grignote(r] le
fromage / À la trappe de l’amour ». Les arrérages de Dieu forment en quelque sorte toutes les misères du monde : les « femmes enchaînées
/ Entre les murs de l’âge mûr », les ouvriers mal payés, « les suicidés
pendus », les exploités, les pauvres, les laissés pour compte de
l’amour.
Dans les trois poèmes qui composent Les tiges de l’amour, ce sentiment devient la voix vers
la sagesse : il faut s’ouvrir à l’amour pour combattre la colère et la haine.
« Je tiendrai ce bonheur / Que la haine a sali / Et pour lui taillerai / Dans
l’ivoire de mes os / Un navire de rêve / Une mer douce de sang / Jaillira de
l’amour ».
Le matin bleu partout
contient deux poèmes. Dans « Maladie de ville », l’auteur aborde
les deux visages de la ville, le laid et le beau. Dans « Salon
intime », c’est plutôt de l’ennui des urbains, dont il est question.
Heureusement que l’amour est toujours là : « Mais la ville à genoux /
Fait un pas vers l’amour ».
L’impossible départ est
un poème en prose d’inspiration plus surréaliste. Quant au contenu, il ajoute peu
de choses à ce qui a déjà été dit. Peut-être peut-on dire que l’auteur traite
le sujet sur un plan plus philosophique. On retrouve encore l’idée que l’amour
peine à émerger : « L’amour par delà la mort enfoui / Vivant sous des
siècles de pierre ». Et l’amour
salvateur : « Comme toute une armée tu es apparue. À tes pieds
foulant la guerre, à la paix laissant un sourire d’enfant. Et je me suis épris
de ta belligérance. Mes désirs ont levé le pavillon de l’attaque, les lignes
ont déroulé un bruit d'océan, la mitraille retamisé les ruines. Vaincue ton
sang maintenant cogne un marteau à la porte de mes tempes. Je suis tissé de toi
portant comme des yeux toutes les mailles de l'amour. »
On l’aura compris, l’arme contre la faim, c’est l’amour et ses variantes, l’amour exutoire, l’amour rédempteur. Au début, le propos s’annonce plus social, plus
revendicatif. C’est la meilleure partie. Quant au style, on y lit de belles
images qui sont le fait d’un véritable poète et d’autres qui semblent plus de
nature à gonfler des idées toutes simples, tout compte fait.
Deux extraits de son autobiographie "À force de vivre"
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