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22 septembre 2023

Fuites intérieures

André-Pierre Boucher, Fuites intérieures, Montréal, éditions d’Orphée, 1956, 98 pages. 

Fuites intérieures, le premier recueil de Boucher (né en 1936), n’a pas la finition qu’on retrouvera dans Matin sur l’Amérique (1958). Il exploite les mêmes thèmes de façon plutôt désordonnée… tout en étirant beaucoup trop la sauce. L’auteur va corriger le tir dans Chant poétique pour un pays idéal, publié en 1966, dans lequel sont repris ses deux premiers recueils avec l’ajout de nouveaux poèmes. Il ne retiendra que 31 poèmes de Fuites intérieures.

On y retrouve le thème amoureux (sans épanchement) et celui du lieu inhabitable (espace saccagé, ville inhumaine). Cependant, les thèmes dominants, ce sont ceux de l’évasion et de l’errance, ce qui revient un peu au même. 

Ce « garçon qui erre sur les ponts » exprime sa désillusion envers une société où la liberté est brimée : « Ville innombrable qui barre nos routes / Les hommes de la terre / se fabriquent des mains sans regard / des cages mesurées / au calcul d’atmosphère étouffant / Pour nos jeunesses » (Terre massive des hommes). À une révolte ouverte, il préfère la fuite dans l’imaginaire : « Je bâtirai des mots neufs / Des volcans d'idées / Jailliront jusqu'au ciel de vos puissances réduites / Des fusions d’images comme des musiques baroques / Des milles et une couleurs d'Orient / Asie mystérieuse et multiple / Apparaissant aux steppes blanches de mes cerveaux / Sillonnées d’impalpables routes boréales. » (Vers le voyage de ma tête). 

Dans plusieurs poèmes, l’évasion-errance-fuite semble prendre la forme d’un voyage projeté avec la personne aimée : 

TU M’APPRENDRAIS

Tu m’apprendrais tes routes tes voyages
tes mers pleines d’oiseaux tapageurs
tes rivages
tes soleils ramassés aux pays que j’ignore 

Nous marcherions dans les algues sèches
poussés par les vents de mer et mêlés aux oiseaux
en se fabriquant des barques d’aurore
avec tes soleils

Nous partirions
sans jamais ne revenir
ivres
et jeunes
Le monde finirait avec nos voyages 

Seuls nos pas lascifs
danseraient sur les sables
la nostalgie précise des voyages qu’on rêve


Le recueil (avec ses quelques fautes d’accord, d’orthographe et de syntaxe) est rare. Je me suis rabattu sur la copie rafistolée de l’Université Laval.


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