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9 décembre 2022

Pour mon pays

Alfred Descarries, Pour mon pays, Montréal, 1922, 144 p. (Biographie et bibliographie par Gérard Malchelosse) 

En introduction, Descarries (1885-1958) nous offre quelques réflexions sur la poésie canadienne-française. « Une oeuvre littéraire canadienne devrait être, à mon humble avis, au moins variée, quelque peu personnelle et est censée traduire, dans une proportion raisonnable, la mentalité, les moeurs, les aspirations du pays dont l'auteur se proclame, le nôtre, sans quoi elle risque fort de perdre de son intérêt. Louons nos plus anciens contemporains, qui ont marché dans la voie tracée par Crémazie, Fréchette, Lemay et autres. »

 

Le recueil contient une trentaine de poèmes, étalés sur trois parties, dont certains ont déjà été publiés dans des revues ou des recueils antérieurs, nous dit l’auteur. 

 

La première partie s’intitule « Gloire immortelle » : la bataille de Chateauguay, la citadelle de Québec, la guerre 14-18, les prouesses du 22e régiment, les mères des soldats en sont les thèmes. On le devine, ce sont des poèmes patriotiques. 

 

« Au gré du rêve » coiffe la seconde partie. Le décès de sa mère, une hymne à l’art, un retour au pays de l’enfance, la maison abandonnée, le quêteux, l’amour du pays et la famille en sont des sujets. En somme, quelques thèmes romantiques et ceux des terroiristes.

 

La troisième partie, la plus intéressante, porte le titre « Croquis, satire et fantaisie ». Descarries fait preuve d’une certaine finesse, même si les sujets et le style sont vieillots. 

 

 

UNE MORT HORRIBLE!

 

Il vivait, roublard et replet,

—On eût dit une énorme andouille—

Et mettait tout son intérêt 

Dans le porc, le boeuf et la houille !

Aussi lourd que son coffre-fort,

Ce trustard machiavélique,

Dans une auto digne d’un lord 

Vautrait son être oligarchique.

 

Despotique autant que le Schah 

De Perse, expert en artifices,

Il donnait des bals de pasha 

Où venaient tramer ses complices.

Sans cesse, un vigoureux valet, 

Fastidieusement servile,

Lorsque le maître roupillait,

Montait la garde au domicile.

 

Diantre ! — c’est tout naturel—

Il avait son siège à la Bourse...

Un siège fort substantiel !

 

C’était un homme de ressource,

Qui suivait la cote avec art, 

Distribuant d’exquis havanes, 

Payant le Mumm et le Pomard, 

Toujours gai, comme Aristophane!

 

Certes, bien plus heureux qu’un roi, 

Ce coquin à face bachique,

Parfois même, se crût le droit 

De se mêler de politique !

On l’entendit, publiquement,

Plein de feu, défendre “les masses” 

Qu’il affamait très poliment,

Comme font les ”escrocs de race !”

 

Un beau soir d’été vit, en pleurs, 

Seuls, les siens près de sa dépouille ! 

Hélas ! sous des monceaux de fleurs 

Reposait l’illustre fripouille!

Jeune encor, riche à millions,

Ciel! est-ce une fin assez sombre:

Mourir d’une indigestion

De porc frais et de vert concombre !

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