Charles-E. Harpe, Le jongleur des étoiles, Montréal, éd. Marquis, 1947, 187 pages. (Préface de Roger Brien)
Brien, en préface, nous apprend que Le jongleur des étoiles est le deuxième livre de Harpe. Son premier, des chroniques sanatoriales, s’intitulait Les croix de chair. Brien salue un auteur en devenir qui atteindra un niveau supérieur « s’il apporte à chacune de ses œuvres futures la perfection de certaines pages ».
Le recueil contient dix textes, des récits et des poèmes, très fortement imprégnés des croyances religieuses de l’auteur. Tous ont tendance à démontrer qu’il ne peut y avoir de vie réussie, saine, en dehors de la religion : « L’art doit servir la foi et non la foi être asservie par l’art. »
Les récits, dont la trame est mince, servent de prétexte au discours de l’auteur. Celui-ci met souvent en scène des personnages en quête de rédemption, à commencer par le récit qui donne son titre au recueil : Robin ne peut gagner le cœur de sa belle sans épouser le sort des éprouvés. Dans d’autres récits, le personnage trouve réponse à ses malheurs en se dévouant pour les gens, tel ce médecin, largué par sa dulcinée, qui choisit d’aller pratiquer chez les paysans (Le berger des solitudes). « C’est un honneur que le bon Dieu nous fait de travailler pour ses pauvres. » Tous ces récits et poèmes nous disent que l’esprit missionnaire est « la seule communion fraternelle possible entre les hommes ».
On comprend que Harpe a fréquenté les classiques, surtout les poètes, de Baudelaire à Aragon en passant par Péguy, Verlaine, etc. Pour donner du poids à son propos, Harpe a tendance à surécrire, comme c’est souvent le cas dans les textes religieux où croyance et poésie s’entremêlent. Selon Roger Brien, Charles E. Harpe (1908-1952) appartient au courant régionaliste; bien que j’y vois un lien avec nos terroiristes, je préciserais que l’inspiration est davantage française que canadienne-française.
Extrait
Que m’importe
le sort d’une douleur amère !
Il en est des oiseaux, meurtris, ensanglantés,
Qui ne peuvent donner l’essor à leur chimère
Et qui chante quand même en des cieux dévastés.
Dites-moi la
beauté des êtres et des choses…
Grisez-moi des printemps fabuleux d’autrefois…
Ma chair palpite encore à l’ivresse des roses
Et je vais sans leur dard me déchirer les doigts
Qu’importe! Si
je chante, en ma foi, la souffrance
C’est qu’elle est sœur de la beauté,
Comme la croix est le tremplin de l’espérance
Aux gouffres de l’éternité!
Et quand le tendre soir, sur nous hisse ses voiles,
Berçant d’une brise vos nids,
Je sens grandir un infini
Bonheur de partager le songe des étoiles!
Sur Charles Harpe
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