Louis-Joseph Doucet, Sur les remparts, Québec, s.n., 1911, 108 pages.
Compte tenu du titre, on pourrait
s’attendre à un recueil qui traite de la ville de Québec ou encore de
patriotisme. On pense au « Vieux soldat canadien » de Crémazie qui
venait sur les remparts de Québec surveiller le retour d’un bateau français. C’est
bien mal connaitre Louis-Joseph Doucet, un poète éclectique qui ne s’embarrasse
pas de plan. Ainsi va l’inspiration ainsi va le recueil. Le premier poème est
une exonération de Bigot, le deuxième un rappel de l’ancienne gloire du château
de Ramezay, le troisième un hommage aux morts, le quatrième une ballade à la
nature…
Les vers les plus personnels de
Doucet sont le fait d’un poète inquiet, qui pense que le temps lui est compté,
comme si la mort rodait autour de lui. « Notre ivresse d’un soir, du même
soir bannie, / Laisse une fibre intime alliée au regret… » (Inquiétude)
Il se voit même déjà au cimetière : « Passant qui foules mon tombeau,
/ J’ai fait comme toi dans la vie » (Dis pour mon âme quelques mots).
Même dans ses poèmes de Noël, il réussit à distiller sa tristesse :
« Ô nouvel an plein de mensonges, / Qu’apportes-tu pour les aînés? »
(Les étrennes) Cette désillusion atteint son paroxysme dans un long et
lugubre poème de 10 pages intitulé : « La voix des solitudes » :
« Le monde est vain, / J’aime la paix des tombes, / Passez mes jours, je
ne vous souris plus, / Va-t’en mon âme aux blanches hécatombes, / Sur le chemin
des espoirs superflus! » Après avoir évoqué de façon froide son premier
amour, il nous lance cette morale : « Pour être heureux sur terre, /
Il faut être soi-même en tout : / Désirer peu, souvent se taire, / Et
parfois… Endurer beaucoup… » (La chanson)
Ses vers à saveur patriotique, plus rares, sont ceux qui magnifient les temps héroïques de la Nouvelle-France et de la période qui lui a succédé, comme si rien de bon n’était arrivé dans ce pays depuis Crémazie. Enfin, on lit un sonnet typique de Lemay et des terroiristes des années 20. Comme il est unique dans le recueil, je le présente en extrait :
LES BATTEURS DE BLÉ
Les batteurs de bon blé
font leur tâche à la grange,
Au rythme des fléaux égrenant les épis ;
Une à une ont passé mille gerbes à frange,
Et le bon blé frissonne en ses carrés remplis.
Pan ! pan ! pan ! du
matin jusqu’au soir aux étoiles,
On entend résonner leurs coups dans le lointain ;
Leurs chapeaux poussiéreux leurs vareuses de toile,
Vieillissent le tableau dans le jour incertain.
Pan ! pan ! hola ! quand
donc finiront-ils la tâche,
Ces batteurs de blé mûr, que l’obscurité cache ?
Pour éclairer leur ombre, ils n’ont qu’un vieux fanal.
Et la poussière monte en
spirale fuyante,
Et le bon blé ruisselle en la paille tremblante
Comme des sables d’or au rayon matinal.
Louis-Joseph Doucet sur Laurentiana
La
chanson du passant
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Sur les remparts
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