Georges Dor, La mémoire
innocente, Montréal, Éditions de L’Aube, [s.d. – 1956?], 60 pages
(Préface d’Émile Legault)
« Il lance les Éditions de
l’Aube. Pas à la manière d’un solitaire qui aurait besoin de s’admirer
secrètement; plutôt comme un crieur de village qui veut alerter tous les
moissonneurs, pour les inviter à partager avec lui la joie des blés, liés en bottes
frémissantes ». À lire le père Legault, on a l’impression qu’on est devant
un recueil du terroir. Rien de tel. Dor pratique la poésie intimiste. Il est
vrai que tout cela est très simple, souvent dans le bon sens du mot, d’où sans
doute la métaphore du moissonneur.
En simplifiant, disons qu’il y a
deux types de poèmes chez Dor : ceux qui sentent le procédé et ceux plus
inspirés. Dans la première catégorie on range ces poèmes qui emploient la
répétition : « Tout est noir / Dans la mémoire // Tout est blanc
/ Dans le néant // Tout est bleu / … » Mais
on trouve aussi ce genre de petits poèmes courts, ramassés, bien tournés :
« Un papier / Dans la rue / En forme de chat mort // Il neige / Une
locomotive crie / Quelque part // C’est la nuit / Tout est blanc à s’y tromper
// Vous souvenez-vous? »
Pour le reste, le poète essaie de
se défaire d’une tristesse qui lui vient de son passé familial, mais aussi
regrette ce qui aurait dû être cueilli et qui ne l’a pas été :
« Efface lentement / Efface patiemment / Et recommence » Et
encore : « Nous avons oublié / Dans les vergers d’automne / Tant de
pommes aux pommiers ». Au fil des poèmes, on découvre un homme qui se cherche et son accomplissement semble tributaire de la présence d’une
compagne : « Parce qu’au bout de moi-même / Au bout de tous les
chemins / De moi-même / Je te trouve ».
Le recueil se termine par trois
lettres écrites à une malade, lettres pleines de douceurs et de compassion. « Je
veux vous aimer, vous aider et pourtant tout m’arrache à vous. Tout un monde
s’ingénie à défaire le nœud de mon attention pour vous. La vie me réclame
partout et l’oubli de votre malheur me poursuit. Le bonheur, mademoiselle, est
une chose troublante, tant il y a de malheur sur la terre ».
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