DALBIS, L.-J., Le bouclier canadien-français, Montréal, Déom, 1925, 246 p.
(Le livre, très bien relié, contient une cinquantaine d’illustrations, soit des photos (le plus souvent de Dalbis) et des dessins (Jean Gay, Adrien Hébert, J. Maillard)
L’essai du professeur Louis-Janvier Dalbis est tout sauf un essai scientifique. C’est une défense passionnée du fait français en Amérique et du roman Maria Chapdelaine. L’auteur s’adresse le plus souvent au lectorat européen, mais aussi au lecteur québécois quand il s’agit de répliquer aux dénigreurs de Maria Chapdelaine. On est en 1925, donc 4 ans seulement après le lancement de l’édition Grasset, et déjà le roman nage dans la controverse. On comprend que Dalbis a eu accès au journal et aux lettres de l’auteur, qu’il est allé à Péribonka interviewer les Bédard et qu’il s’est servi des quelques brèves études déjà parues, donc celle de Léon-Mercier Gouin.
(Le livre, très bien relié, contient une cinquantaine d’illustrations, soit des photos (le plus souvent de Dalbis) et des dessins (Jean Gay, Adrien Hébert, J. Maillard)
L’essai du professeur Louis-Janvier Dalbis est tout sauf un essai scientifique. C’est une défense passionnée du fait français en Amérique et du roman Maria Chapdelaine. L’auteur s’adresse le plus souvent au lectorat européen, mais aussi au lecteur québécois quand il s’agit de répliquer aux dénigreurs de Maria Chapdelaine. On est en 1925, donc 4 ans seulement après le lancement de l’édition Grasset, et déjà le roman nage dans la controverse. On comprend que Dalbis a eu accès au journal et aux lettres de l’auteur, qu’il est allé à Péribonka interviewer les Bédard et qu’il s’est servi des quelques brèves études déjà parues, donc celle de Léon-Mercier Gouin.
Son essai compte deux parties. Dans la première, « Le bouclier canadien-français », il retrace les étapes de la survivance française en Amérique. Je ne m’y attarderai pas, cette partie n’ayant rien à apprendre au lecteur québécois. Dans la seconde, « En lisant Maria Chapdelaine », Dalbis essaie de démontrer que ce roman, « mieux que les ouvrages d’histoire, mieux que les ouvrages d’érudition [va] révéler au monde la longue résistance pathétiquement héroïque des Français au Canada ». (p. 71)
Il commence par retracer la vie de Louis Hémon, en insistant sur son passage au Québec. On note quelques erreurs de fait : pour lui, Hémon aurait fait deux voyages au Lac-Saint-Jean, il aurait fréquenté assidument Éva Bouchard, il aurait été frappé par un train venant en sens inverse… Ensuite, il nous donne en quelques chapitres une analyse assez juste du roman. Entre autres, il essaie de démontrer que Maria n’est pas un roman platement réaliste, que les symboles y occupent une place importante : « Cette fille, déshéritée entre toutes, est le vivant symbole de la fidélité à l'âme canadienne-française, fidélité au culte, fidélité à la langue, fidélité au pays vierge lentement défriché, "où une race ancienne retrouvé son adolescence". » (p. 134) Il consacre tout un chapitre au lien que Maria entretient avec le paysage, selon moi, le point fort de l’essai. Moins convaincants sont les chapitres où il cherche absolument une symbolique des noms (passent encore pour Paradis et Surprenant, mais Chapdelaine, Gagnon!), où il essaie de nous convaincre que le roman respecte les unités classiques, que toute l’action converge vers l’idée du devoir de survivance.
Ensuite, l’auteur reprend une à une les critiques qui ont été adressées au roman : on le sait, on a reproché à Hémon d’avoir faussé l’image du Canadien français en choisissant des colons plutôt que des agriculteurs établis dans la vallée du Saint-Laurent; on lui a reproché d’avoir donné une image trop négative du curé, du médecin et du climat. Darbis démolit une à une ces critiques. Les trois derniers chapitres sont plus hétéroclites : dans celui intitulé « Le roman et la publicité », l’auteur essaie d’imaginer comment le cinéma américain dénaturerait ce roman s’il s’en emparait. Et il conclut (on est en 1925!) : «Désormais, rien ne peut plus empêcher que dans l'avenir on lise encore la description du pays de Québec, telle qu'elle fut fixée sur la toile en l'an de grâce 1913 par un Français de France. "Maria Chapdelaine" reste une chose unique et rien ne pourrait modifier une œuvre dont les chances de survie résident dans la langue, le paysage et la psychologie. Parce que l'objet a plus de netteté que l'image et que l'image reste toujours moins nuancée que le mot, le cinéma, quelque scénario qu'il adopte, profanera cette œuvre. Il y a dans a récit tant de finesse et tant de subtilités que, seule, la souplesse de la langue est capable de les envelopper. Si les tentatives laites pour porter l’œuvre à la scène n'ont pas complètement réussi, c'est que ce récit renferme trop de choses intraduisibles. C’est qu'à vouloir le découper en plusieurs actes cependant bien définis, on en supprime les ombres, les reflets et le charme; pour le schématiser on le dépoétise. Les phrases, si ployées soient-elles à l’expression des sentiments, ont besoin de la musique, et la musique seule pourrait traduire les silences de Maria qu'un mot ou même un geste risqueraient de gâter. » (p. 204-205)
Enfin, il fait un parallèle avec Colette Baudruche, un roman de Maurice Barrès auquel on a souvent comparé Maria. Et il conclut en soulignant que Maria a beaucoup contribué à la connaissance du Canada français en France. « Chacun sait désormais qu'il y a là-bas sur la terre d'Amérique des hommes de sa race, dont il parle la langue, et à côté des aventuriers avides de dollars, des hommes de la terre avides d'idéal » (p. 234)
Le Bouclier canadien-français
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