23 novembre 2024

Trois

Beaulieu Michel et Nicole Brossard et Micheline de Jordy, Trois, Montréal, Les presses de l’ageum, 1965, 95 p. (Le recueil a été imprimé sur les « presses des éditions Orphée ».)

Beaulieu et Brossard étaient deux étudiants impliqués dans le journal Le quartier latin à l’Université de Montréal. Beaulieu avait déjà publié ses deux premiers recueils. Certains poèmes dans ce recueil sont quand même antérieurs à ceux des recueils précédents. Quant à Brossard, ce sont ses premiers poèmes. Dans la section « A paraitre », on annonce Mordre en sa chair qui sera publié par les éditions Estérel en 1966. Quant à Micheline de Jordy, je n’ai aucune idée de qui elle est.

Michel Beaulieu : Ballades et satires

Le thème amoureux est dominant. Rien de très original dans ces vers, rien qui annonce le poète qu’il deviendra. Beaucoup de poèmes se veulent « musicaux ». Vous reconnaissez Beaulieu dans ce quatrain ? « Elle est belle / Dans la nuit / La pucelle / Dans le puits ». Oui, certains poèmes sont rimés. De toute évidence, ses premiers poèmes.

Nicole Brossard : Aube à la saison

« Sur fil de lumière / je suspends la poésie / comme guirlandes ». Ainsi commence la section de Brossard. Comme on le voit, la poésie elle-même est objet d’écriture, mais avec des référents que Brossard ne reprendrait probablement pas : en plus de « guirlandes », la poésie est associée à « orbite de mes horizons », « éboulis », « arc-en-ciel », « étang », « vase », « algues » et « bouées ». On y rencontre la solitude et les revers, mais on y lit aussi toute l’énergie d’une certaine génération, désireuse de se libérer, de mordre dans la vie, de s’arrimer au « brusque virage d’un nouvel âge » : « peu à peu notre œil s’est poli comme caillou / pour apprendre la beauté / nous avons miroité des jeux pleins / de paupières et de regards / au nom des aubes nouvelles / nos mains circulent des miroirs / à travers l’ébène des nuits ». La poésie est très lyrique, souvent de belle venue, avec beaucoup de références à la nature.

Micheline de Jordy : Anneaux et fêtes

Comme le titre l’indique bien, il y a quelque chose de festif dans cette poésie, ne serait-ce l’omniprésence des couleurs. La célébration passe aussi par le regard sur la nature. Ainsi dans son poème « L’été » : « Mon cœur d’argile / exposé / rouge sur feuille verte / salure laquée / dans un soleil d’huile ». Dans le titre, il y a aussi le mot « anneau », tout ce qui contraint : « Il a marché dans le gris de ton œil / tout le noir des soleils en guerre / pour me tuer ». Le ver est plus hachuré chez de Jordy que chez Beaulieu ou Brassard. J’y vois l’influence d’Anne Hébert.

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