Adolphe Brassard, Péché d'orgueil, Montréal, Imprimerie des sourds-muets, 1935, 262 pages.
De retour, Étienne est dévasté, ce dont l’oncle se réjouit. Il retourne dans le Nord pour oublier. Six ans plus tard, le cousin d’Étienne et sa femme adoptent sans le savoir Paul, l’enfant d’Étienne et de Gilberte. Celui-ci grandit, termine son cours classique. Un jour, il apprend qu’il est un enfant issu d’une crèche, donc illégitime, et il en est dévasté. Les années passent, il finit ses études, se fait un nom et rencontre Alix de Busques, une jeune fille qui se considère aristocrate et qui n’a que mépris pour Paul et ses origines douteuses. Elle finit pourtant par l’épouser, par orgueil, parce qu’il l’a provoquée. Leur relation tourne vite au vinaigre. Ils s’entendent pour préserver les apparences.
Au même moment, le vieux Joachim fait parvenir à Étienne, toujours dans le grand Nord, une lettre lui demandant de passer le voir. Pour compléter sa vengeance, le vieux lui jette à la figure le fait qu’il a placé son fils dans une crèche. Étienne se met à sa recherche et découvre que son fils a été adopté par son cousin. Les retrouvailles entre le père et le fils se passent très bien.
Le mariage de Paul et Alix bat de l’aile. Les deux s’aiment mais ratent toutes les occasions de se rapprocher (le péché d’orgueil du titre). Sur le lit de mort d’Étienne, Paul raconte à son père l’amour qu’il porte à sa femme, ce que cette dernière entend. Ils finissent par se parler vraiment et, comme il se doit, l’amour triomphe.
Ce récit adopte la trame des récits populaires. Les personnages sont campés dans des travers poussés au paxoxysme. Ainsi en est-il de l’orgueil d’Alix, de l’amour d’Étienne ou de la méchanceté du vieux Joachim. Cela conduit à des invraisemblances psychologiques auxquelles le lecteur de roman populaire doit prêter foi pour ne pas briser l’illusion. Brassard raconte, tantôt avec finesse et tantôt de façon ampoulée, les aventures de ses héros. Le roman est plutôt bien écrit et l’humour allège le caractère mélodramatique du roman.
Extrait
« Alix frémit. Amour, ce mot venait de descendre
dans son cœur, et donnait un nom à ce qui s’y passait. Elle ne se défendit pas
pour nommer celui qui la jetait dans cet émoi troublant. Elle aimait son mari,
et pour se l’avouer, elle sentit son amour grandir et la prendre toute.
Empoignée par la sublimité de ce chant vainqueur, la jeune femme l’écoutait
dans le ravissement, mais soudain, comme ces nuages subits qui cachent le
soleil et jettent de l’ombre sur les choses resplendissantes, une angoisse
terrible faite d’une certitude absolue, irréfutable, vint l’affoler puis la
terrassa: elle aimait Paul, mais lui ne pouvait plus l’aimer, jamais. Alix vit
avec épouvante la vie qui allait être la sienne, une vie de dissimulation et de
souffrance. Son amour, il devra se consumer ignoré, elle devra le cacher à
celui qui l’avait fait éclore […]. En songeant à l’humiliation qui l’écraserait
si Paul un jour venait à découvrir qu’elle l’aimait, Alix fit appel à son
orgueil pour lui éviter cet affront. Il arriva en se faisant prier mais la
fierté de la jeune femme bondit et arriva à la rescousse. Non, elle, Alix de
Busques, ne deviendra pas la risée de Paul Bordier. Personne ne connaîtra le
secret de son cœur… » (p. 142-143)
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