18 mai 2021

Nostalgies

Jean Dollens (Estelle Bruneau), Nostalgies, Sherbrooke, La Tribune Ltée, 1938, 159 p. (Préface d’Alfred Desrochers)

Le surnom qu’elle s’est donné en dit déjà beaucoup : « Dollens » signifie souffrir en latin. En effet, « Nostalgies » baigne dans un climat de morosité peu commun. 

Les déboires de l’autrice sont d’abord amoureux. « Vous n’aimez plus, mais vous souffrez encore. / Ah! gardez-le ce mal qui vous poursuit : / Il est un bien même s’il vous dévore ».  Au milieu du recueil, on lit trois poèmes interreliés : Le passé, Le présent, Le futur qui correspondent à la perte des illusions, à la solitude et au désespoir : « Alors, j'irai chercher la Mort dans son mystère / La priant de couper de son glaive tranchant / La chaîne de mes jours, sur cette froide terre, / Et je m’endormirai sur son cœur fascinant. » On a droit à un long poème de 15 pages, narratif et expressif, sur le Requiem de Mozart et aux « dernières paroles » du Christ sur la croix, images de la douleur et de la mort. D’autres références culturelles citées, comme la Sonate pathétique et Les Fleurs du mal, ne trempent pas non plus dans la joie.

« La Vie est ce grand livre où la misère humaine, / S’étale à chaque page en chapitres fatals; / La reliure est la Douleur qui nous enchaîne / Et nous étreint parfois de son baiser brutal. » Derrière ce pessimisme, on sent une certaine révolte, mais surtout beaucoup de résignation, comme si toute vie n’était que douleur et tristesse.

Comme extrait, je cite le dernier poème du recueil, occasion de constater que cette poésie, truffée d’adjectifs, se déploie laborieusement.

LA POÉSIE

La Poésie est ce nectar délicieux
Qui fait s'enivrer l'âme immortelle des dieux;
C’est une harpe d’or dont les cordes subtiles
Évoquent les soupirs de voluptés fragiles;

C’est un souffle divin dont le mystérieux
Frémissement murmure un chant mélodieux;
C’est un flambeau sublime aux lueurs volatiles
Éclairant, des humains, les cœurs trop versatiles.

Mystique Poésie, âme aux reflets changeants,
Tu planes dans l'éther sur tes ailes d’argent,
Vers le bleu crépuscule, atmosphère du Rêve;

Flamme phosphorescente, idole des mortels.
Astre majestueux qui lentement s’élève,
Le monde se prosterne au pied de tes autels…

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