Hector
Berthelot, Les Mystères de Montréal,
Roman de mœurs, Montréal, Imprimerie A. P. Pigeon, 1898, 118 pages.
Ce roman fut d’abord publié, en feuilleton, dans Le Vrai Canard en deux étapes : la
première partie est publiée du 20 décembre 1879 au 31 juillet 1880 ; la
deuxième paraît du 13 novembre 1880 au 5 mars 1881. Berthelot avait adopté le
pseudonyme Monsieur Ladébauche. L’édition que je présente, c’est celle de 1898,
la première présentée en volume.
Berthelot a divisé son roman en trois sections : un long prologue
qui fait 8 chapitres et deux autres parties de 20 et 16 chapitres. Les
chapitres sont courts, de même que les phrases, ce qui est compréhensible
compte tenu du public auquel il était destiné. Disons-le tout de suite,
l’édition est négligée, truffée de fautes et d’irrégularités typographiques.
On ne résume pas un tel livre par le menu détail. Ce serait trop long,
tant les événements fourmillent, souvent sans attache logique entre eux.
Prologue
Bénoni
Vaillancourt est amoureux d’Ursule Sansfaçon. Ses revenus ne lui permettent pas
de l’épouser. Cléophas Plouff fait aussi
la cour à Ursule. Il a quarante ans et il est séparé de sa femme et de ses
enfants. Bénoni est jaloux et sa jalousie augmente quand Cléophas sau ve la
belle. Les deux en viennent au coup et se retrouvent devant le juge.
Première partie
Un
notaire-détective du nom de Caraquette
doit s’assurer que les termes de l’héritage du Monsieur de Saint-Simon soient
respectés. Pour l’instant, le comte et la comtesse de Bouctouche profitent de cet
héritage puisque leur jeune fils est le légataire universel de cet oncle décédé. Or l’enfant meurt. Le comte cache la mort de
son fils et décide de le remplacer par un autre enfant. C’est Cléophas Plouff
qui l’aide dans cette entreprise en lui proposant le jeune frère d’Ursule
(beaucoup plus âgé que l’enfant décédé!). Le comte meurt à son tour (il s’est empoisonné
lui-même!); Cléophas, ayant compris ses
manigances, réussit à mettre la main sur le trésor des Bouctouche que
Caraquette trimballe dans une valise (!?).
Deuxième partie
Après
avoir assassiné Cléophas, Bénoni s’est emparé du trésor des Bouctouche et mène
grande vie. Il épouse en grandes pompes Ursule. Caraquette finit par découvrir
la vérité et fait chanter Bénoni. Finalement, il le dénonce à la police. Ce
dernier est arrêté et pendu. Le trésor est remis à la veuve qui épouse un
certain Malpèque, lequel était l’héritier suivant du comte de Saint-Simon.
Quelques personnages |
Le roman va un peu dans tous les sens. Le paroxysme de la
confusion est atteint dans la seconde partie. L’auteur se mêle dans son
histoire. Bénoni se demande où est caché le trésor des Bouctouche, alors que
quatre chapitres plus tôt, c’est lui-même qui l’a volé et caché.
La narration est maladroite : l’auteur coordonne mal les
actions simultanées de ses personnages : «Laissons maintenant Caraquette à
St-Jérôme et retournons à Montréal.» Le développement des personnages laisse
souvent pantois : ainsi la comtesse qui ouvre un débit illégal de boisson
pour survivre. Le développement manque de cohérence : des personnages
changent du tout au tout pour satisfaire aux caprices des événements.
Est-ce à dire que ce roman ne vaut pas la peine d’être lu?
Non. Il y a quand même une présence de
la ville de Montréal, le défilement de ses rues, de ses places, des hôtels, des
débits de boisson, des métiers de l’époque, des journaux, des moyens de
transports… Il y a aussi un foisonnement au plan du langage qui vaut à lui seul
le détour. Bon, c’est vrai qu’il y a beaucoup de mots anglais (parfois
francisés) et d’anglicismes (swell, lofer, fair-play, flush; «Il portait un
pea-jacket en velveteen un peu usé aux coudes et doublé en farmer’s satin. »);
mais on trouve aussi beaucoup d’expressions (le sens de plusieurs m’échappe)
assez savoureuses. J’en ai relevé neuf :
·
Il menait la vie à grandes guides : il
menait grand train
·
se sentir un peu casquette : un peu saoul
·
faire peter la bande de jim rabette d’un
portefeuille : l’ouvrir
·
oeil de vaisselle : œil de verre
·
attraper une gratte : se faire engueuler
·
Comme il logeait le diable dans sa bourse :
n’avait pas d’argent
·
Caraquette en cherchant son voleur avait fait
buisson creux : n’était arrivé à rien
·
brosser son chien dans les auberges : se
saouler
· quelques jeunes gens qui ne cherchaient qu’à
effeuiller sa couronne de vertu : je vous laisse deviner!
Il y a aussi beaucoup d’humour ; d’abord, ce petit mot d’amour que
Bénoni sert à Ursule : « Chère belle gueule »; presque illettré, ce même Bénoni écrit à sa
belle : « Lesse moé assavoir ton
adresse pour que j’aie te voir à Singe Erôme. » Et ce commentaire de
l’auteur sur les deux tourtereaux : « Vous allez croire qu’ils se
sont embrassés. Pas du tout. Les bouches des deux amoureux se touchèrent, mais
ce fut pour changer de gomme. »
Sincèrement je suis d'accord avec le rythme de l'histoire, n'étant pas québécoise c'est un peu difficile à comprendre ( c'est plus facile quand je l'écoute) . Le véritable personnage principal est bel et bien Montréal. Une si belle ville, vivante, souvent ''sale'' souvent ''coquine''. Il serait bien d'adapter l'histoire ou en podcast . ( peut être changer certains détails pour qu'on ne ressente pas les embrouilles de l'auteur.
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