J’ai rarement lu un livre baignant
autant dans une religiosité morbide. La religion est associée à la souffrance,
à l’abandon, à la résignation, à l’abnégation, au sacrifice, à l’effacement, au
déni de soi. Comme si les voies de la religion devaient passer par une forme de
masochisme pour qu’elles puissent avoir de la valeur, s’éclairer.
Le recueil compte une longue
nouvelle, trois courtes et sept poèmes. Je ne m’attarderai pas aux poèmes qui
n’ajoutent rien aux récits.
En
introduction, Alphonse Leclaire écrit : « …en l’écrivant notre jeune
et délicate romancière a voulu faire un acte de réparation ; elle a voulu faire
oublier cet écrivain qui, en retour de notre hospitalité nous paya jadis
d’esquisses satiriques et qui, sous prétexte d’écrire un roman vécu, mit au
jour un simple pamphlet où les qualités littéraires étaient loin de racheter la
malveillance des intentions. » Qui est cet écrivain si peu reconnaissant
qui n’est pas nommé? C’est probablement Charles ab der Halden (Études de littérature canadienne-française,
Paris, Rudeval, 1904 et Nouvelles Études
de littérature canadienne-française, Paris, Rudeval, 1907).
Cœur Magnanime
Au retour de
France, Monsieur et Madame Solier ont adopté un enfant (Rodrigue) dont les
parents sont morts tragiquement lors de la traversée. Ils ont déjà une petite
fille Anne-Marie. Les deux enfants deviennent inséparables et, devenus plus
vieux, amoureux. Quand Rodrigue doit aller parfaire ses études de médecine à
Paris, il promet à Anne-Marie l’amour éternel avant son départ; pourtant, il
tombe amoureux d’Odile, la jeune fille de 18 ans de ses logeurs et il l’épouse.
Le mariage dure peu puisqu’il meurt lors d’une épidémie de typhoïde. Avant de
mourir (lire l’extrait), il demande à sa jeune femme enceinte de venir
rejoindre Anne-Marie au Canada. Elle meurt peu de temps après avoir mis au
monde une petite fille prénommée Carmen. Et les parents d’Anne-Marie meurent
aussi. Le temps s’accélère, Carmen a 16
ans et elle entre chez les carmélites. Elle finit par convaincre sa mère d’en
faire autant.
Le frère adoptif qui épouse sa sœur, c’était quand même dérangeant : Monge a choisi un personnage de substitution (Odile) qui ne fera que passer dans le roman. L’enfant de Rodrigue deviendra l'enfant de sa demi-soeur après la mort de sa mère. Mélodramatique et larmoyant, presque insupportable. « Nous savons, nous chrétiens, que Dieu ne nous éprouve jamais au-delà de nos forces, et qu’il proportionne toujours la croix à la faiblesse de nos épaules. Anne-Marie était une vaillante : Dieu la traitait comme telle. Il burinait sa grande âme, comme Il forme les saints, à l’école de la douleur et du sacrifice. Après chaque nouvelle épreuve la courageuse jeune fille se redressait plus virile et plus généreuse encore. À ceux qui la plaignaient sur sa triste et précoce solitude elle répondait avec une angélique douceur : mais je ne suis pas complètement seule ; Dieu ne chemine-t-Il pas avec nous ? »
Le frère adoptif qui épouse sa sœur, c’était quand même dérangeant : Monge a choisi un personnage de substitution (Odile) qui ne fera que passer dans le roman. L’enfant de Rodrigue deviendra l'enfant de sa demi-soeur après la mort de sa mère. Mélodramatique et larmoyant, presque insupportable. « Nous savons, nous chrétiens, que Dieu ne nous éprouve jamais au-delà de nos forces, et qu’il proportionne toujours la croix à la faiblesse de nos épaules. Anne-Marie était une vaillante : Dieu la traitait comme telle. Il burinait sa grande âme, comme Il forme les saints, à l’école de la douleur et du sacrifice. Après chaque nouvelle épreuve la courageuse jeune fille se redressait plus virile et plus généreuse encore. À ceux qui la plaignaient sur sa triste et précoce solitude elle répondait avec une angélique douceur : mais je ne suis pas complètement seule ; Dieu ne chemine-t-Il pas avec nous ? »
Une œuvre d’artiste
Un couple vit
heureux jusqu’à ce que le mari épouse les thèses des francs-maçons. En voulant
détruire une croix, il meurt quand elle lui tombe dessus. Sa femme meurt aussi
bientôt et leur fils est recueilli par un vieil oncle qui est potier. L’enfant
se révèle très habile, et un sculpteur célèbre le prend sous son aile. Il
étudie et, au faîte de son art, il crée une magnifique croix qu’il destine à
son village natal. Le crime de son père étant racheté, il entre en religion.
La rançon
Le père de la jeune
Marie-Louise est devenu alcoolique depuis que sa femme est morte et qu’il est
venu en ville. La jeune fille est remise dans le droit chemin de la religion
catholique par une religieuse. Marie-Louise promet de donner sa vie pour sauver
son père. Et sa promesse arrive malgré elle : elle est frappée par une
bouteille d’alcool qui était destinée à son père. Sur son lit de mort, elle lui
fait promettre de retourner à la campagne et de cesser de boire. Ses vœux
seront exaucés.
Une âme de Prêtre
Un prêtre, ancien militaire,
arrive dans une paroisse du sud de la France où la pratique religieuse laisse à désirer. Il réussit par son zèle à
gagner tout le monde, sauf deux « brebis galeuses ». C’est en sauvant le fils de l’une d’elle d’un
chien atteint de la rage qu’il vaincra ses deux derniers récalcitrants. Sauf
qu’il y laissera sa peau.
Les poèmes ont pour titre :
Amour, À un petit Oiseau, L’appel Divin, Cœur de Mère, Petit Jean, Résignation
et Le Rayon.
Extrait
« Rassemblant
ce qui lui restait de force, il se souleva et appelant sa jeune femme, il la
serra une fois encore contre son cœur qui allait bientôt cesser de battre.
« Ma petite
Odile — lui dit-il — faisons généreusement notre sacrifice. Courbons-nous
chrétiennement sous la main qui nous flagelle. Dieu qui venait de nous unir et
qui déjà brise nos liens, nous réunira bientôt dans sa sainte demeure. Ne nous
révoltons point contre Sa volonté ; elle est toujours subordonnée à son immense
amour. Il ne nous éprouve aussi cruellement aujourd’hui que pour nous
récompenser plus magnifiquement demain… Je ne te dis donc pas adieu, ma
bien-aimée ; mais : au revoir… Cependant je m’en irai plus tranquille, si tu
voulais me promettre d’aller trouver Anne-Marie dès que je ne serai plus. Tes
parents sont, eux aussi, au terme de leur route, tu seras seule en ce monde :
auprès de ma sœur la solitude te sera moins amère. En elle tu auras l’amie la
plus sûre et la plus fidèle ; en toute confiance tu pourras te reposer sur ce
cœur si bon et si généreux. » Comme la pauvre jeune femme lui répondait, d’une
voix pleine de sanglots : « Je partirai. » « Oh ! merci — ajouta-t-il en
l’étreignant une dernière fois — merci ma petite Odile ; à présent je puis
mourir ! »
C’était une scène poignante, dont longtemps je me
souviendrai, que ces tristes épanchements entre ces deux époux, nouvellement
unis et dont l’un s’en allait
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