Faucher de
Saint-Maurice, De tribord à bâbord. Trois croisières dans le golfe Saint-Laurent, Montréal, Duvernay frères & Dansereau, 1877,
458 pages.
Ce livre a connu un immense succès si on se fie aux éditions rapprochées dont il a bénéficié. Une première version de ces récits de voyages est parue dans De tribord à bâbord en 1877. En plus du golfe Saint-Laurent, l'auteur décrit les Maritimes et la Gaspésie. Dans les éditions (tirages) ultérieures, Faucher (son vrai nom) a scindé son livre en deux, les « promenades » dans le golfe (la visite des phares) faisant dorénavant l’objet d’un livre autonome, intitulé : Promenades dans le golfe Saint-Laurent - une partie de la Côte Nord, l'Île aux Œufs, l'Anticosti, l'Île Saint-Paul, l'archipel de la Madeleine (Typographie de C. Darveau, 1879, 207 p.) . (Je n'ai lu que cette partie du voyage.)
Ce livre a connu un immense succès si on se fie aux éditions rapprochées dont il a bénéficié. Une première version de ces récits de voyages est parue dans De tribord à bâbord en 1877. En plus du golfe Saint-Laurent, l'auteur décrit les Maritimes et la Gaspésie. Dans les éditions (tirages) ultérieures, Faucher (son vrai nom) a scindé son livre en deux, les « promenades » dans le golfe (la visite des phares) faisant dorénavant l’objet d’un livre autonome, intitulé : Promenades dans le golfe Saint-Laurent - une partie de la Côte Nord, l'Île aux Œufs, l'Anticosti, l'Île Saint-Paul, l'archipel de la Madeleine (Typographie de C. Darveau, 1879, 207 p.) . (Je n'ai lu que cette partie du voyage.)
À la lecture, on comprend que Faucher de Saint-Maurice
(1844-1897) a accompli au moins trois fois (1873-1874-1875) le trajet dans le golfe Saint-Laurent. Pourquoi? Était-ce lié à ses fonctions (il est fonctionnaire, puis député à partir de
1881) ou simple plaisir
touristique?
On est au printemps 1874. « Le Napoléon III partait ce matin-là pour
ravitailler les phares de la côte et du golfe Saint-Laurent. » Les passagers
embarquent donc sur un bateau du gouvernement chargé de marchandises. Pointe-des-Monts,
au large de Baie-Trinité, est le premier arrêt sur lequel Faucher insiste. Les
voyageurs rencontrent le gardien du phare, célèbre sur la Côte-Nord, surtout en
raison du livre qu’a laissé sa fille sur la vie dans un phare au XIXe siècle
(Élioza Fafard, Légendes
et récits de la Côte-Nord du Saint-Laurent). Vont faire partie du
trajet deux autres phares de la Côte-Nord (L’Île-aux-Œufs et Sept-Îles),
trois phares de l’île d’Anticosti (Sud-ouest, Sud, Pointe-aux-Bruyères), trois
phares de l'Archipel de la Madeleine (Île Brion, île du Rocher-aux-Oiseaux, Île
de Saint-Paul), et finalement trois des Îles-de-la-Madeleine (l’Anse-à-la
cabane, l’île d’Entrée, l’île de la Pierre Meulière [Cap-aux-Meules]
).
Faucher présente les membres de
l’équipage et au moins deux autres passagers, dont l’un est un gardien de phare
qui retourne sur l’île d’Anticosti. L’autre, Agénor Gravel, tient une place
dans le récit parce que, très coloré, il anime le groupe. L’auteur présente
aussi la plupart des gardiens de phare, parfois leur famille, leur petite
histoire.
L’histoire des naufrages occupe
une bonne place dans le livre : on le sait, le golfe Saint-Laurent est un
cimetière d’épaves, d’où la multiplication des phares. Les plus célèbres
naufrages sont celui de Walker à l’Île-aux-Œufs en 1711 (l’auteur lui consacre
tout un chapitre) et celui de la Renommée
en 1736 que le Père Crespel a rendu célèbre : Voiages du R. P. Emmanuel Crespel dans le Canada, et son naufrage en
revenant en France. Faucher raconte
aussi l’histoire des lieux (la possession, les ressources, la configuration) et
fait aussi un peu de place à certains personnages célèbres qui les ont marqués,
de Jolliet jusqu’à Gamache.
Pour rendre son livre plus attrayant, en plus de se mettre lui-même en scène, Faucher
de Saint-Maurice ajoute plusieurs anecdotes
liées au voyage; par exemple, le Napoléon III manque de s’enliser en approchant
des côtes des Îles-de-la-Madeleine et grâce aux manœuvres du capitaine et à
l’intervention de Sainte-Anne-du-Nord, il s’en sort miraculeusement. Beaucoup
moins reluisante est la « partie de chasse » menée par les voyageurs
sur le Rocher-aux-Oiseaux : « … les pierres et les coups de fusil
partaient drus comme grêle. Il fallait voir alors les malheureux volatiles (les
fous de bassan) dégringoler par grappes dans l’onde qui, ce jour-là, n’était
pas aussi amère que leur existence. Franchement, pareille tuerie devenait
dégoûtante. C’était avoir des dispositions au meurtre que de taper ainsi sur
ces animaux stupides ; et comme nos gens y prenaient goût, ce ne fut qu’à force
d’instances que nous parvînmes à faire cesser cet inutile massacre. »
En terminant, voici un passage
sur les Îles-de-la-Madeleine, de l’amiral Bayfield (The St. Lawrence pilot) que Saint-Maurice cite et que je cite à
mon tour : « Par une journée chaude et ensoleillée, l’œil ne peut se
rassasier de contempler ces falaises multicolores, où le rouge est la couleur
dominante, et où le jaune blafard des lagunes de sable fait antithèse au vert
tendre des pâturages, au vert sombre des bois, au bleu saphir du ciel et de la
mer. Ces contrastes produisent alors un effet extraordinaire, et contribuent à
donner à cet archipel un cachet artistique, qu’on ne saurait retrouver aux
autres îles au golfe Saint-Laurent. Par les jours de gros temps, lorsque le
vent d’est fouette et fait rage, le paysage change, il est vrai ; mais il n’en
reste pas moins aussi caractéristique. Alors les pics isolés des îles, leurs
falaises échiffées, se glissent, apparaissent confusément à travers la pluie,
le brouillard, et semblent reliés entre eux par une ceinture de brisants qui
masquent presqu’entièrement les bancs de sable et les lagunes. Garde à vous,
matelots ! n’approchez pas alors impunément de la Madeleine. En voulant la
serrer de trop près, vous talonneriez, et vous seriez naufragés avant d’avoir
pu même éventer le danger. » (p. 161)
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